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19 janvier 2014 7 19 /01 /janvier /2014 16:46

misère                

 

Jean Ferrat a chanté, maintes fois, des textes d' Aragon, la douleur de vivre... la douleur des gens miséreux qui souffrent, vagabonds du monde.

 

Aragon évoque, ainsi, dans un de ses poèmes intitulé : "J'entends", mis en musique par Jean Ferrat, la résignation des pauvres, leur absence de colère, leur peu d'exigences, car ils savent se contenter d' un simple "feu" de bois pour se réchauffer.

 

Le poète entend, écoute leurs voix, leurs propos familiers et ordinaires et porte un regard attentif sur eux : ils ne sont que" pierres tendres tôt usées", "aux apparences brisées". L'image traduit bien la violence et les dures conditions de vie de ces êtres exclus, rejetés hors du monde : les voilà transformés en objets, pierres sur le chemin que l'on peut fouler aux pieds.

 

Le regard que porte le poète sur ces pauvres êtres lui "arrache l'âme" jusqu'au désespoir : on perçoit une détresse partagée par l'auteur qui ne supporte pas la vision de ce malheur absolu et injuste.

 

Par la triple répétition de l'adjectif "profond" associé au malheur, Aragon souligne l'abîme insondable de misère et de détresse de ces exilés du monde.

 

Et pourtant, tous voudraient espérer un avenir meilleur représenté par "un ciel bleu" d'azur, vaines espérances qui ne sont que "miroirs aux alouettes".

 

Le poète, lui-même, se berce d'espoirs, et il voit alors combien tous ces êtres lui ressemblent, sont à son image : celle d'une humanité souffrante, misérable comme le suggèrent des comparaisons : nous sommes tous des"grains de sable" insigifiants, nous sommes "sang versé et doigts blessés", images même de la douleur humaine...

 

Malgré ces ressemblances, la rencontre semble, pourtant, impossible entre le poète et ces êtres perdus : une trop grande distance les sépare, et c'est bien ce qui se passe, aussi, dans la réalité : on a l'impression de mondes parallèles qui se côtoient sans jamais communiquer vraiment, comme si tout dialogue était impossible à cause du fossé qui sépare les êtres.

 

Et pourtant, l'humanité vit sous les mêmes régles : parfois un enfer de douleurs, la mort, le port commun des hommes...mais l'impuissance à aider les plus pauvres est bien réelle et le poète affirme sa volonté d'être utile tout en constatant une forme d'incapacité..."un rêve à la fois modeste et fou"...un rêve qui semble irréalisable et qu'il faudra enterrer avec le poète comme "une étoile au fond du trou."

 

L'image finale de l'étoile traduit bien l'idée d'un rêve impossible : aider les plus humbles qui sont à notre image se révèle souvent une mission difficile, tant le fossé qui sépare les gens est grand.

 

Pourtant, ce rêve apparaît comme une lumière, il est "modeste" et devrait, de fait, être accessible à tous.

 

Ce poème d'Aragon plein d'humanité, d'humanisme, évoque à la fois le malheur de la condition des hommes, mais aussi les difficultés d'aller au devant des plus pauvres comme si un abîme séparait les uns et les autres...

 

On peut constater toute l'actualité de ce texte : avec la crise, le nombre de miséreux ne cesse de croître et ils vivent dans un un monde à part comme si un fossé les éloignait de nous.

 

La mélodie qui accompagne le texte oscille entre espoir et désespérance par sa limpidité, ses notes désabusées...

 

Vidéo : Jean Ferrat

 

https://youtu.be/LUb7uIYUHCo

 

 

 
 
 
 
 
 

 

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commentaires

L
<br /> Beau poème mis en musique et qui touche au plus profond !<br /> <br /> <br /> Merci Rosemar !<br />
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R
<br /> <br /> Un poème très émouvant, oui ; Ferrat et Aragon, un beau tandem...<br /> <br /> <br /> Bises et belle semaine LH<br /> <br /> <br /> <br />
F
<br /> "aider<br /> les plus humbles qui sont à notre image se révèle souvent une mission difficile, tant le fossé qui sépare les gens est grand."<br /> <br /> <br /> C'est si vrai<br /> .<br /> <br /> <br /> La simplicité,<br /> l"humanité et le talent de Ferrat manquent vraiment dans la chanson française d'aujourd'hui.<br /> <br /> <br /> Bises et belle<br /> semaine Rosemar<br />
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R
<br /> <br /> Nous vivons dans un monde si cloisonné, difficile d'aller à la rencontre des autres et pourtant, comme le dit Ferrat, ce rêve de justice est "modeste"... La voix de Ferrat est pleine<br /> d'humanité, d'émotions.<br /> <br /> <br /> Bises du sud et belle semaine à toi<br /> <br /> <br /> <br />