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26 avril 2023 3 26 /04 /avril /2023 09:40
Sauver la grammaire...

 

Pour l’association Sauver les Lettres, l’enseignement de la grammaire à l’école a été sacrifié depuis des années...

La grammaire n'est pas à la mode : elle paraît trop austère. Elle est pourtant essentielle à la compréhension de notre langue...

 

L' Education nationale a sans cesse réformé la grammaire, les différentes terminologies, apportant ainsi la confusion et le trouble.

Un simple exemple : dans la dernière terminologie officielle publiée sur le site du ministère, dans la phrase "Je vais à Paris", "à Paris"  est analysé comme un COI (complément d’objet indirect) du verbe aller, et non comme un complément circonstanciel de lieu, comme on l'enseignait autrefois.

Et pourtant, il paraît essentiel pour une bonne compréhension de l'analyser comme un complément de lieu...

 

L’apprentissage formel de la langue occupe moins d’heures que jadis, les programmes ayant régulièrement exigé que moins de temps soit consacré à l’orthographe et davantage à la production d’écrits. Sans résultats concernant celle-ci.

Sont aussi relevées des difficultés en conjugaison. La maîtrise des variations du verbe réclame une pratique  continue, pas seulement des exercices ponctuels. C’est évidemment à l’écrit que se manifestent les difficultés en conjugaison et en orthographe, pas à l’oral.

 

Je me souviens de la visite d'un inspecteur alors que j'enseignais en collège : il me reprochait alors d'avoir consacré une heure de cours à une leçon de grammaire pure portant sur la notion d'attribut. Ce n'était pas assez ludique, sans doute...

Selon lui, il fallait grappiller dans les textes lus en classe quelques exemples de cette fonction grammaticale et expliquer cette notion à l'occasion de ces lectures...

Donc, pas de leçons apprises par coeur, et surtout pas un temps long consacré à la grammaire...

 

On en voit les résultats de nos jours : de nombreux élèves ne maîtrisent pas leurs conjugaisons, ont des difficultés pour accorder les verbes, comprennent mal les textes et les énoncés...

Bien évidemment, ces difficultés sont dues à un certain laxisme, à une volonté de réduire le niveau d'exigence.

Or, il est important que les élèves soient confrontés à des difficultés, à des efforts car l'échec est aussi un apprentissage.

Il est temps de remettre à l'honneur la grammaire, l'orthographe, les conjugaisons, la valeur des temps, des modes...

Il est temps de rétablir de véritables leçons de grammaire...

 

 

Source :

 

https://www.nouvelobs.com/opinions/20230307.OBS70410/plaidoyer-pour-une-grammaire-scolaire.html

 

 

 

Sauver la grammaire...
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16 décembre 2022 5 16 /12 /décembre /2022 12:54
Le ciel couleur d'améthyste...


"L'aube a des lueurs exquises ; on entend des chants d'oiseaux, le ciel est couleur d'améthyste ; et quand j'ouvre les yeux, sous l'impression plus douce du matin, je vois des frémissements de bien-être courir à l'extrémité des palmiers."

C'est ainsi que le romancier Eugène Fromentin décrit la beauté de paysages orientaux, à l'aube, dans un de ses ouvrages intitulé Un été dans le Sahara.


L'améthyste ! Des couleurs violettes surgissent ! Des brillances, des éclats, des transparences !

Améthustos ! Nom grec aux sonorités éblouissantes !

Le mot, avec sa labiale "m", sa dentale redoublée "t", sa consonne sifflante "s", sa graphie de consonne aspirée "th" venue du grec, nous entraîne dans un monde de mystères et d'étrangeté...

Le mystère des mots, leurs douceurs, leurs éclats ! 

Que de résonances et d'images étonnantes, que de couleurs et de lueurs !
Ce mot rare nous étonne, nous fait rêver : il évoque des teintes nuancées de mauve, de violet, de rose pâle ou de xanthe....

Il nous fait voir des glacis de lumières, des pierres aux éclats de roches, des envolées de cônes élancés...

Pierre de lucidité, de clarté, l'améthyste, censée préserver de l'ivresse, aux couleurs de vin coupée d'eau, fait briller des facettes lumineuses....


Ce mot venu du grec ἀμέθυστος / améthustos, est un adjectif verbal composé du verbe μεθύω / methúô (« être ivre »), et du préfixe privatif ἀ- / a- ... La pierre aurait été ainsi nommée parce qu'elle a la couleur du vin coupé d'eau, dont le titre alcoolique est moindre. Par rapprochement, elle passait pour préserver de l'ivresse...


Ciels étoilés, lumières étincelantes sur la voûte sombre et violette !


L'améthyste rutile de scintillements, elle s'enflamme de lueurs éclatantes, elle nous entraîne vers des nuits d'été aux cieux flamboyants, des mers vineuses et violettes aux flots déchaînés....


Champs de lavandes, bleuets, glycines, lilas, iris, toutes les fleurs bleues s'épanouissent sous nos yeux !


Fleurs de thym, de romarin, des harmonies de bleu s'éveillent, des ciels du sud, couleur de blanc-bleu s'ouvrent à nous...


Des mers aux reflets de soleil, replient leurs vagues bleues sur le sable, des cèdres bleutés vrillent le ciel, des embruns de glycines flottent dans l'air...


Des opalines laissent apparaître des teintes adoucies de mauves, on voit des fleurs violettes mêlées de blancs, des écumes de vagues sur les pierres...


 Pour mémoire :


 

"Le poète Rémy Belleau (1528-1577) a composé un poème mythologique intitulé L'améthyste, ou Les Amours de Bacchus et d'Améthyste,  dans lequel il imagine Bacchus éperdument épris de la belle Améthyste et la poursuivant avec fureur. Améthyste aux beaux yeux implore alors Diane, déesse de la chasteté, qui a pitié d'elle et la transforme en pierre. Bacchus, frustré, décrète alors que quiconque boira dans une coupe faite de cette pierre ne pourra pas savourer l'ivresse de son vin. Et la pierre prit en outre la couleur du vin.


L'améthyste est un membre de la famille des quartz dont la couleur varie du violet foncé au bleu lavande. Elle tient cette couleur d'un mélange de fer et d'aluminium, ainsi que d'une irradiation naturelle. L'améthyste est un cristal très répandu qui se trouve aux États-Unis, en Grande Bretagne, au Canada, au Brésil, au Mexique, en Russie, au Sri Lanka, en Uruguay, en Afrique de l'est, en Sibérie et en Inde."






 

Le ciel couleur d'améthyste...
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10 octobre 2022 1 10 /10 /octobre /2022 12:20
Des élèves qui ne maîtrisent pas les outils de la langue...

 

Sans la maîtrise de la langue, point de pensée, point de réflexion, point de compréhension des idées...

Les apprentissages de la langue, de la grammaire, de l'orthographe sont essentiels : pourquoi les avons nous abandonnés ?

 

Au nom de l'égalitarisme, on a voulu supprimer les difficultés, les subtilités, les nuances de la langue française... Quelle erreur !

Car au bout du compte, ce sont de nombreux élèves qui en font les frais : ils se retrouvent démunis devant des textes littéraires, philosophiques, et ils ne les comprennent pas.

 

Dès le primaire, la grammaire de notre langue doit être apprise avec rigueur : la grammaire n'est pas innée, elle doit être l'objet d'un apprentissage précis et minutieux.

Non, l'élève n'est pas apte à construire lui-même son savoir : il faut lui donner les outils, lui apprendre les règles qui régissent notre grammaire.

Cet apprentissage doit passer aussi par la mémorisation de règles...


Or, depuis des années, l'enseignement n'a plus de mémoire, la mémoire a été sacrifiée : autrefois, les élèves devaient apprendre des règles de grammaire et d'orthographe, les mémoriser... Ces apprentissages fondamentaux ont été négligés au profit d'une pédagogie de la découverte.

Désormais, c'est à l'occasion de textes, que s'organisent les leçons de grammaire, si bien qu'elles ne sont pas vraiment structurées, ni mémorisées.

Il faudrait, pourtant, réhabiliter la mémoire qui est essentielle : il faudrait que chaque élève ait l'occasion de former et de développer sa mémoire, par un apprentissage permanent.
 

 

Comment s'étonner de la baisse du niveau quand on sait que dans le primaire l'horaire hebdomadaire de français a été divisé par deux en moins d'un siècle ?

De la même façon, au collège, les heures de français ont été considérablement réduites.

Et que dire de l'enseignement des lettres classiques sacrifié par la réforme du Collège de Najat Vallaud-Belkacem ? Tout organisme vivant, privé de ses racines, est voué à mourir...

 

Trop souvent, aussi, dans des articles de journaux publiés sur internet, on voit des fautes d'orthographe, des erreurs grossières de syntaxe.

Ces articles mériteraient d'être relus et corrigés : c'est la moindre des choses...

            

 

 

 

 

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/repliques/l-ecole-republicaine-a-t-elle-un-avenir-3621509

 

 

Des élèves qui ne maîtrisent pas les outils de la langue...
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2 septembre 2022 5 02 /09 /septembre /2022 11:59
La douceur subtile de l'anthémis...


L’anthémis ! Fleur de lumière ! Elle ressemble à un astre brillant d’autant que l’anthémis est souvent paré de la couleur du soleil… jaune d'or et d'éclat doré !

 

Le nom de la fleur anthémis ne contient-il pas le mot ἄνθος, anthos "la fleur" en grec ? Et l' anthémis évoque d'autres fleurs connues ou moins connues : "le chrys-anthème"  ou la fleur d’or, l’anth-urium, plante tropicale, l’anth-yllis, fleur laineuse qu’on trouve parfois sur le pourtour méditerranéen, qui aime à la fois le soleil et les embruns de la mer.


 
L’anthémis, la fleur par excellence, par son nom même ! Quelle floraison nous offre cette plante luxuriante et abondante ! De véritables bouquets de fleurs, à n’en plus finir, les tiges hautes nous font voir le spectacle de pétales éclatants de couleurs : jaunes, blancs, roses.


 
Les fleurs se dressent telles de petites marguerites dont le centre plein ressemble au toucher et à l’œil à un doux nid d’abeille soyeux et précieux.


 
Le feuillage vert léger, volatile, très souple fait danser la fleur au vent. L’anthémis nous touche par sa petite corolle qui ressemble à s’y méprendre à un bijou serti de pétales.


 
Au soleil, les couleurs de l’anthémis sont encore plus éclatantes et resplendissent parfois de nuances subtiles du jaune pâle au plus foncé, du rose tendre au fuchsia … un bouquet aux teintes subtiles qui fait songer à une aquarelle.


 
Les fleurs roses aux couleurs nuancées peignent des tableaux pleins d'harmonie, de beauté, de splendeur et de charmes...


 
Les fleurs dorées de miel et blanches nous enchantent par leurs douceurs feutrées et soyeuses...


 
Les pétales autour de la fleur rayonnante s'arrondissent en des cercles de lumières...
 
 
 
 
 

 

 

 

 

Photos : Pixabay

La douceur subtile de l'anthémis...
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22 juillet 2022 5 22 /07 /juillet /2022 11:02
Dictées de notre enfance...


Les dictées de notre enfance étaient souvent des textes choisis qui nous permettaient, aussi, de découvrir la littérature...

Exercice laborieux pour certains, plaisir de bien écrire pour d'autres, la dictée fait partie des apprentissages de l'orthographe.

Quelque peu délaissée ces dernières années, la dictée, la vraie mériterait d'être remise à l'honneur... Je parle ici de la vraie dictée et non de ces ersatz : dictées à trous, ou préparées...

 

Le mot nous parle de l'enfance, il nous fait entendre les voix solides des enseignants qui font vibrer les textes.

 

Ce nom, avec ses sonorités de dentales "d" "t", de gutturale "k" semble claquer et retentir comme pour nous montrer l'autorité du maître.

 

Enfant, j'aimais cet exercice qui permettait de découvrir des mots parfois mystérieux et étranges. Je sais que d'autres éprouvent des difficultés face à cette épreuve...

Pourtant, la dictée, par sa lenteur, permet de se recentrer sur l'essentiel : le texte est d'abord lu intégralement, puis redit avec précision, enfin relu, une dernière fois.

 

Le mot est ancien, il remonte à un verbe latin "dictare", "dire en répétant". Formation de fréquentatif, ce verbe implique, donc, une idée de réitération...

Venu d'un autre verbe "dicere", "dire", le mot "dictée" a des origines très anciennes : un radical "deik" qui signifie "montrer".

 

De là est issu le mot "digitus", "le doigt, ce qui sert à montrer", on retrouve ce sens originel dans les termes "indiquer" ; "index, le doigt qui sert à montrer" et les composés de -dex comme "judex" (« juge, celui qui dit le droit »), "teach" (« enseigner ») en anglais, "δίκη, dikê" (« droit, justice ») en grec ancien.
 

La dictée et le doigt ont donc une même origine !

Dire, c'est "montrer par la parole", et les doigts et les mains servent aussi à s'exprimer...

On a tous en tête des dictées que l'on n'a pas oubliées, des textes envoûtants, par exemple celui-ci :

 

Daudet Les lettres de mon moulin, Installation

 

"Un joli bois de pins tout étincelant de lumière dégringole devant moi jusqu’au bas de la côte. À l’horizon, les Alpilles découpent leurs crêtes fines… Pas de bruit… À peine, de loin en loin, un son de fifre, un courlis dans les lavandes, un grelot de mules sur la route… Tout ce beau paysage provençal ne vit que par la lumière.

Et maintenant, comment voulez-vous que je le regrette, votre Paris bruyant et noir ? Je suis si bien dans mon moulin ! C’est si bien le coin que je cherchais, un petit coin parfumé et chaud, à mille lieues des journaux, des fiacres, du brouillard !… Et que de jolies choses autour de moi ! Il y a à peine huit jours que je suis installé, j’ai déjà la tête bourrée d’impressions et de souvenirs… Tenez ! pas plus tard qu’hier soir, j’ai assisté à la rentrée des troupeaux dans un mas (une ferme) qui est au bas de la côte, et je vous jure que je ne donnerais pas ce spectacle pour toutes les premières que vous avez eues à Paris cette semaine. Jugez plutôt.

Il faut vous dire qu’en Provence, c’est l’usage, quand viennent les chaleurs, d’envoyer le bétail dans les Alpes. Bêtes et gens passent cinq ou six mois là-haut, logés à la belle étoile, dans l’herbe jusqu’au ventre ; puis, au premier frisson de l’automne, on redescend au mas, et l’on revient brouter bourgeoisement les petites collines grises que parfume le romarin… Donc hier soir les troupeaux rentraient. Depuis le matin, le portail attendait, ouvert à deux battants ; les bergeries étaient pleines de paille fraîche. D’heure en heure on se disait : « Maintenant, ils sont à Eyguières, maintenant au Paradou. » Puis, tout à coup, vers le soir, un grand cri : « Les voilà ! » et là-bas, au lointain, nous voyons le troupeau s’avancer dans une gloire de poussière. Toute la route semble marcher avec lui… Les vieux béliers viennent d’abord, la corne en avant, l’air sauvage ; derrière eux le gros des moutons, les mères un peu lasses, leurs nourrissons dans les pattes ; — les mules à pompons rouges portant dans des paniers les agnelets d’un jour qu’elles bercent en marchant ; puis les chiens tout suants, avec des langues jusqu’à terre, et deux grands coquins de bergers drapés dans des manteaux de cadis roux qui leur tombent sur les talons comme des chapes."

 


 

Dictées de notre enfance...
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1 juillet 2022 5 01 /07 /juillet /2022 11:38
Boby Lapointe : l'enchanteur du verbe...

 

Voilà 50 ans que disparaissait Boby Lapointe, chanteur, compositeur, interprète, poète de l'absurde, des jeux de mots. Ce virtuose des calembours nous a laissé des textes d'une drôlerie inouïe...


Boby Lapointe nous surprend encore par les trouvailles de langage dont il fait preuve : poète incontestable des mots, il nous fait rire, sourire de sa bonne humeur...
 
Né le 16 avril 1922 dans le sud de la France, à Pézenas dans l'Hérault, le jeune Boby ne se destinait pas initialement à une carrière de chanteur : féru et passionné de sciences et de mathématiques, il envisageait un métier dans l'aviation et ambitionnait de devenir pilote d'essai. Après l'obtention du baccalauréat, il prépare deux écoles : centrale et supaéro...
 
Mais la guerre l'empêche alors de poursuivre ses ambitions : il doit partir en 1943 à Linz en Autriche, pour rejoindre le STO. Il parvient à s'évader et se retrouve à La Ciotat où il exerce le métier de scaphandrier.


 
Après avoir touché à différents métiers, vendeur de layettes, installateur d'antennes de télévision, électricien, livreur, Boby Lapointe entre dans la carrière musicale en 1956...
 
A défaut de voler sur des avions, Boby va devenir voltigeur de mots, il va faire virevolter les mots dans des chansons devenues célèbres...


 
Il fait ses débuts en tant que chanteur dans un cabaret parisien, le Cheval d'Or. Il y rencontre des chansonniers célèbres de l'époque : Anne Sylvestre, Raymond Devos, Ricet Barrier et Georges Brassens, avec qui naît une amitié réciproque... Il connaît un certain succès et attire l'attention du réalisateur François Truffaut. Celui- ci imagine de lui faire jouer un rôle de chanteur de bar dans son nouveau film Tirez sur le pianiste, avec Charles Aznavour. Ses chansons" Framboise" et" Marcelle" sont mises en valeur dans ce film. Il est ensuite engagé dans un autre cabaret parisien ,les Trois baudets et commence à enregistrer des chansons : Marcelle, Bobo Léon, Aragon et Castille ...


 
D'autres compositions célèbres suivront : Ta Katie t'a quitté, Saucisson de cheval, Comprend qui peut, Méli-mélodie, Le tube de toilette, La maman des poissons.


 
Quel magicien des mots, quel virtuose fut Boby Lapointe ! Son originalité, sa verve font de lui un poète à part : jeux de mots, créativité verbale incroyable, humour et inventivité nous surprennent encore... Quelle bonne humeur, quelle joie de vivre transparaissent dans sa musique et ses textes ! Boby Lapointe sait , comme nul autre, nous transmettre ce bonheur des mots... Il nous parle de la maman des poissons, avec tant de drôlerie, il manie le verbe et les sonorités avec talent dans Ta Katie t'a quitté... Sa fantaisie fait de lui un poète à part, peu connu et reconnu de son vivant, jugé à la fois trop intellectuel par certains et trop rigolard par d'autres, ce jongleur, ce troubadour, ce trouveur, cet inventeur, ce prestidigitateur génial de mots nous entraîne dans un univers inédit...
 
On n'a pas fini de redécouvrir ses chansons et ses textes qu'il faut aussi lire et relire pour en percevoir toute la saveur.
 
Disparu trop tôt le 29 juin 1972, à l'âge de 50 ans,  Boby Lapointe a connu une carrière fort brève mais il nous a laissé de nombreuses chansons hilarantes : il faut réécouter, par exemple les calembours en tous genres de la chanson, Tube de toilette ou encore la fraîcheur du texte, La fille du pêcheur...


 
Personnage farfelu, amuseur, enchanteur du verbe, mathématicien de génie puisqu'on lui doit aussi un système de numération bibi- binaire utilisé en informatique et qui sera validé par des scientifiques en 1968, acteur à ses heures, chansonnier, Boby Lapointe apparaît comme un artiste hors du commun...et des sentiers battus.
 

 
 

 

 
 

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24 juin 2022 5 24 /06 /juin /2022 13:01
Allons sous la charmille où l'églantier fleurit...

 

"Puisque les prés sont verts, puisque le ciel est bleu,

Aimons. Par les grands mots l'idylle est engourdie ;

N'ayons pas l'air de gens jouant la tragédie ;

Disons tout ce qui peut nous passer par l'esprit ;

Allons sous la charmille où l'églantier fleurit,

Dans l'ombre où sont les grands chuchotements des chênes."

 

Voici une belle invitation à l'amour écrite par Victor Hugo : le cadre champêtre décrit dans ces vers avec simplicité n'est-il pas propice à l'amour ?

 

 

Le mot "charmille" désigne une allée plantée de charmes, souvent taillés en forme de berceaux.... Issu du nom latin "carpinus", le mot charme évoque un arbre somptueux, dont le nom fait rêver....

Le nom "carpinus" est de genre féminin en latin, comme la plupart des noms d'arbres, car on considérait que les arbres étaient habitées par des divinités féminines.

 

On connaît aussi l'homonyme "charme", venu du latin "carmen", "le vers, l'incantation magique" qui renvoie à une toute autre notion, une idée de séduction intense...

 

Curieuse homophonie entre deux mots assez différents au départ "carpinus" et "carmen" ! Mais les évolutions phonétiques ont modifié deux termes différents qui se sont, ainsi, rapprochés... La consonne "c" se transforme souvent en une chuintante "ch" dans le passage au français...et la fin d'un mot disparaît parfois parce que la finale n'était pas accentuée en latin...

 

Le mot "charmille" est plein de poésie : il suggère un cadre champêtre, une ombre douce et bienveillante, il invite à la rêverie...

 

Avec ses sonorités de chuintante, de gutturale, de labiale, ce nom à la finale féminine, nous entraîne dans un univers fait de beauté et d'harmonie : la charmille est accueillante, elle invite à la promenade, à la découverte... 

 

Les vers de Victor Hugo insérés dans le groupe des idylles sont une invitation à l'amour,  l'idylle étant un petit poème qui célèbre l'amour dans un décor pastoral...

 

Hugo parvient à donner à l'évocation une extrême douceur grâce à de jeux de sonorités : allitération de la consonne "ch" avec les mots "charmille, chuchotement, chênes...", utilisation de consonnes très douces, sifflante "s", fricative "f"..., emploi de voyelles nasalisées qui ralentissent le rythme et qui invitent à la rêverie amoureuse...

 

Le verbe "aller" à l'impératif souligne l'invitation et entraîne le lecteur vers ce monde idyllique, au décor attirant : les charmes, l'églantier en fleurs, les chênes personnifiés...

 

On perçoit, aussitôt, des couleurs, des parfums de fleurs : l'églantier, rosier sauvage nous entraîne dans un sillage de senteurs....

 

  

 
 

 

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20 mai 2022 5 20 /05 /mai /2022 11:50
Sylvain Tesson : "Il faut choyer, vénérer les mots !"

 

Invité d'honneur de l'émission La Grande Librairie du mercredi 11 mai , Sylvain Tesson a rendu un magnifique hommage aux mots, à la langue...

 

"Ma vie, c'est raconter par des mots tout ce que je vis, c'est à dire transformer en verbe les sensations que j'éprouve, les émotions qui me traversent, les situations que je vis et les rencontres que je fais...

Avec l'impression que ce n'est pas vécu complètement tant que ce n'est pas écrit. Sinon, ça se volatilise dans l'indicible.

J'adore dire ce que j'ai vécu, d'ailleurs, je prends des notes tout le temps, je raconte, je vis deux vies, en fait. Une vie organique, sur le plan réel, dans la substance réelle des choses et après, je la transcris sur le papier.

 

J'aime la restitution formelle en mots de ce qui a été vécu, mais je n'ai pas besoin d'y ajouter la fiction, je n'ai pas besoin d'y ajouter cette espèce de dopant, de stéroïde de l'imaginaire... j'ai l'impression que c'est du dopage, c'est comme quand on s'injecte des substances pour aller plus vite dans la côte, je n'ai pas besoin de la fiction. Je trouve que c'est tellement incroyable, le spectacle du monde, le spectacle des hommes, ce qui vous traverse, la vie, le simple corps humain, le spectacle d'une main qui se referme, tout cela vient de millions d'années, de mystères qui ne sont pas encore très bien compris, pas encore très bien connus, tout est incroyable !

 

Tout ce qui se dévoile est beau, tout est mystérieux, tout ce que vous rencontrez, tout est adorable... alors, pourquoi ne pas se contenter d'écrire ce qui vous est arrivé ? Et ça vous précipite dans une espèce de roman qui est votre propre vie..."

 

Mais il y a aussi le style de Sylvain Tesson, souvent empreint d'autodérision, de jeux de mots, d'un amour fou pour la langue, l'histoire, la géographie...

"Il y a une chose que j'aime profondément et que j'aimerais partager avec tous les gens que j'aime, c'est l'amour des mots, j'aime les mots, je trouve cela merveilleux...

Ce sont des voyageurs remarquables, ils viennent de très loin, ils ont traversé des siècles, parfois, ils ont été un petit peu torturés, parfois, on ne les comprend pas, parfois, on les emploie pour autre sens, ce sont souvent des migrants, ils viennent de partout, ils se sont fécondés, parfois ils ont disparu.

 

Il y a une espèce de richesse sensuelle dans le vocabulaire et dans l'usage des mots... moi, j'adore les dire !

En plus, j'ai eu un problème physique, à la suite d'une chute. Donc, l'élocution est devenue difficile, alors, c'est comme un travail de pétrissage, j'aime dire les mots, j'aime les chuintantes, j'aime les sifflantes, j'aime les dentales, c'est pour moi un effort d'articuler et je trouve qu'il faut rendre grâce aux mots.

 

Il y a la langue, c'est ce qu'il y a de plus beau, le verbe ! C'est notre propre, c'est ce qui fait que vous et moi, on est des êtres humains : c'est pas uniquement qu'on est bipède et que l'on a, comme diraient les paléontologues, les yeux qui nous permettent de regarder de face, comme les prédateurs, ce n'est pas que ça, le propre de l'homme...

Le propre de l'homme, c'est le verbe, c'est la capacité de dire le monde, de le recomposer, de le recréer, de le comprendre, de recréer un plan de réalité avec simplement le verbe ! C'est magnifique ! Il faut choyer les mots, il faut les vénérer !

C'est dommage que nous soyons un peu, en ce moment, dans une époque où les machines ont pris tellement de place, partout autour de nous, entre nous, en nous, même, que la langue s'est un peu écartée, elle est un peu intimidée, elle s'est appauvrie.

Certes, il y a encore des gens qui ont le verbe haut, qui parlent clair, qui parlent fort, il y a encore des langages merveilleux, il y a encore des gisements pétrolifères, il y a encore des gisements sémantiques, il y a encore des gisements de mots techniques, argotiques, il y a encore des gens qui parlent de magnifiques langues soit extrêmement châtiées, soit extrêmement populaires, mais, en tout cas, le personnel qui est censé nous diriger, l'autorité politique qui parfois, dans l'histoire, a usé d'un verbe superbe, je pense aux oraisons, je pense aux grands discours, je pense aux grandes plaidoiries, aujourd'hui, ils s'expriment vraiment comme des marchands de semelles de caoutchouc, ça ne va pas du tout..."

 

Quel vibrant éloge des mots et de la langue !

Magnifique éloge dans lequel Sylvain Tesson use d'un langage imagé, poétique !

Un éloge au cours duquel il magnifie les sonorités, chuintantes, sifflantes, gutturales, dentales... un éloge où il dévoile son amour pour la langue française, sa diversité, ses richesses, ses différents registres...

Célébrons les mots !

 Ecoutez le nom de l'aurore, aussitôt apparaissent des teintes dorées et roses d'une matinée transparente et claire... Entendez le mot "pécore" et vous voyez aussitôt la prétention, la sottise de celle qui parle à tort et à travers.

 

Les mots nous parlent d'autant plus qu'ils nous sont inconnus ou mystérieux : "amarante, cinabre, synecdoque, cicindèle." Les mots offrent, alors, une beauté exotique et lointaine qu'on a envie de découvrir comme de nouvelles terres, de nouvelles conquêtes, des territoires inexplorés.

 

Les mots se répondent aussi, se parlent entre eux, ils s'associent, se marient ou se contrarient. Le verbe, ou le mot par excellence, l'adverbe, le verbiage se fondent harmonieusement. L'homonyme, le synonyme, l'anonyme et l'antonyme forment une symbiose parfaite, une famille de mots inséparables.

 

 

Source :

https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/la-grande-librairie-saison-14/3342676-emission-speciale-sylvain-tesson.html

 

 

 

Sylvain Tesson : "Il faut choyer, vénérer les mots !"
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29 avril 2022 5 29 /04 /avril /2022 11:36
Des pâtres silencieux dodelinaient dans la musique...

 

 

"Du joueur dans l'ombre, seules apparaissaient les mains : son corps, comme celui d'un dieu, était de l'autre côté de la nuit. Autour de lui, impondérable et souverain, des bûcherons, des pâtres silencieux dodelinaient dans la musique...  Au delà du foyer, le ventre de la guitare envoûtait toujours les bûcherons. Il en fluait un bruit gluant, moitié ronflement de ruisseau et voix d'arbre..."

 

 

Dans cet extrait du roman de Giono, Naissance de l'Odyssée, des paysans écoutent la musique d'une guitare et en suivent le rythme, en "dodelinant".

 

Ce verbe "dodeliner" qui signifie "se balancer doucement", est sans doute lié à l'expression enfantine "dodo" qui sert à bercer et à apaiser les jeunes enfants.

Duplication de la première syllabe du verbe "dormir", le mot "dodo' est utilisé dans des berceuses populaires connues de tous...

Le verbe "dodeliner", avec sa dentale redoublée, ses voyelles variées, traduit bien ce balancement régulier du corps, ce bercement léger.

Ce mot qui renvoie à un terme familier est rempli d'expressivité...

 

Dans l'extrait de Giono, les paysans semblent vibrer au rythme de la musique produite par une guitare. Avec ce verbe, on perçoit leurs mouvements réguliers et doux, on voit leurs gestes mesurés, on ressent aussi leur passion et leur intérêt pour cet air de guitare qui surgit de la nuit.

 

Ces bûcherons sont, d'ailleurs, silencieux, tout à l'écoute de la musique.

Ils semblent même imprégnés de cet air de guitare, car ils dodelinent "dans la musique."

 

Ce beau verbe expressif, à la dentale redondante, nous emporte dans le monde de l'enfance, des berceuses d'autrefois, pleines de simplicité, de charmes...

 

Il nous fait entrevoir des attitudes familières et courantes : une tête qui dodeline au son d'une musique entraînante, une envie de se laisser bercer par des airs que l'on aime.

 

Ce verbe, aux voyelles distinctes, le "o" ouvert, le "i" plus aigu et fermé, le "e", plus neutre restitue bien une sorte de mélodie variée qui incite à un bercement léger et régulier.

 

Ce verbe nous séduit par ses sonorités et par les images qu'il suscite : doux balancements de palmes, une harmonie rythmique, des chansons qui envoûtent, qui font rêver...

 

Giono nous montre un moment magique de communion autour d'une musique : on entre dans le choeur de ces bûcherons sensibles à un air de guitare...

 

 

  
 

 

 

 

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23 avril 2022 6 23 /04 /avril /2022 08:50
Le château était un de ces bâtiments, mélange de grandeur et de mélancolie...


"Le château dans lequel mon domestique s’était avisé de pénétrer de force, plutôt que de me permettre, déplorablement blessé comme je l’étais, de passer une nuit en plein air, était un de ces bâtiments, mélange de grandeur et de mélancolie, qui ont si longtemps dressé leurs fronts sourcilleux au milieu des Apennins, aussi bien dans la réalité que dans l’imagination de mistress Radcliffe. Selon toute apparence, il avait été temporairement et tout récemment abandonné. Nous nous installâmes dans une des chambres les plus petites et les moins somptueusement meublées. Elle était située dans une tour écartée du bâtiment. Sa décoration était riche, mais antique et délabrée. Les murs étaient tendus de tapisseries et décorés de nombreux trophées héraldiques de toute forme, ainsi que d’une quantité vraiment prodigieuse de peintures modernes..."

 

C'est ainsi que Edgar Alan Poe décrit un château abandonné au début de la nouvelle intitulée Le portrait ovale...

Le château ! C'est le lieu des récits de notre enfance, des livres d'histoire, des contes de fées...

Lieu par excellence du fantastique, lieu de mystères, lieu chargé de passé, d'histoire, le château fascine : les tours hautaines, avec leurs meurtrières ténues, étroites, impressionnent.

La grandeur des lieux, la hauteur des murailles suscitent, à la fois, admiration, fascination et frayeur...

 

A l'intérieur, on admire des cheminées imposantes, des décors somptueux, des meubles massifs et lourds, de grands miroirs qui reflètent la lumière...

Le château évoque le luxe, l'abondance : on est ébloui par des tapisseries d'un autre temps, des salles immenses où l'on se perd, des portraits de personnages illustres qui ornent les murs de pierre.

 

Le château évoque aussi les culs de basse fosse, des endroits secrets, cachés, obscurs, où étaient enfermés des rebelles hors la loi, souvent de pauvres gens.

Le château fait surgir des images de fantômes, des apparitions mystérieuses, inquiétantes... On songe à tant de récits fantastiques, le portrait ovale de E A Poe, Le chevalier double de Théophile Gautier, tant de récits troublants, envoûtants qui nous emmènent au bord du rêve...

 

Le mot lui-même est ancien : issu du latin "castellum", qui désignait le "fortin", ce nom lui-même n'est-il pas étonnant, malgré son air familier ?

Avec son accent circonflexe, venu de la consonne "s" disparue, le château revêt une dimension encore plus étrange et mystérieuse.

La chuintante initiale, la dentale "t" forment un ensemble à la fois doux et éclatant... Les deux sons voyelles "a" et "o" semblent suggérer toute l'admiration que suscitent ces lieux.

 

Le château n'est-il pas plein de charmes ? Les créneaux, les tours, les tourelles, les ponts levis, les échauguettes, tous ces mots ne sont-ils pas, en eux mêmes, empreints de mystères ?

C'est comme si l'accent de ce mot l'auréolait, aussi, d'étrangetés, cet accent nous fait voir le sommet des tourelles, des vertiges de hauteurs !

 

Le château peut être parfois château de sable, et il fait encore rêver à un monde de lumières, aux vacances, au bord de la mer, à des châteaux éphémères que les vagues dispersent....

 

Le château représente aussi un monde d'illusion, quand on se met à "faire des châteaux en Espagne"....

"Qui ne fait châteaux en Espagne ?", écrivait La Fontaine, qui ne rêve pas d'un avenir meilleur et plus souriant ?

 

 

 


 

 

Photos : Pixabay

Le château était un de ces bâtiments, mélange de grandeur et de mélancolie...
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