Les difficultés de l'amour, un amour non partagé qui fait souffrir, tel est le thème de ce texte écrit par Aragon, mis en musique et interprété par Jean Ferrat.
Le texte s'ouvre sur une question directe, avec l'emploi de la deuxième personne du singulier :
"Que sais-tu des plus simples choses
Les jours sont des soleils grimés
De quoi la nuit rêvent les roses"
Le poète nous fait entrer dans une intimité, il semble s'adresser à chacun de nous, nous montre qu'on ne voit pas, souvent, l'essentiel, "les plus simples choses"... Les roses personnifiées, dotées de rêves deviennent un mystère de plus, une énigme à déchiffrer, belle expression qui évoque tant de sentiments retenus, cachés...
On perçoit une fêlure dans l'expression : "Les jours sont des soleils grimés", comme si la lumière n'existait plus vraiment, avait disparu, pour celui qui ne peut vraiment aimer, dans la plénitude... L'idée est développée dans la phrase qui suit "Tous les feux s'en vont en fumée", les flammes de l'amour, image traditionnelle, sont comme étouffés et ne deviennent que de vaines fumées.
Le refrain résonne, alors : "Que sais-tu du malheur d'aimer ?" L'amour transformé en souffrance est mis en évidence par une question douloureuse, une interrogation, pleine de tourments et de reproches...
La vaine quête amoureuse est soulignée par le verbe "chercher" : "Je t'ai cherché au bout des chambres, Où la lampe était allumée...", une quête qui semble infinie et impossible, comme le suggère l'expression : "au bout des chambres".
On perçoit, aussi, une dissonance dans la phrase "Nos pas n'y sonnaient pas ensemble
Ni nos bras sur nous refermés..." Les négations mettent en évidence une union impossible, un désaccord.
Le verbe "chercher" revient, les questions sont redoublées, comme pour intensifier le désarroi : "Je t'ai cherchée à la fenêtre Les parcs en vain sont parfumés Où peux-tu où peux-tu bien être."
Une autre question montre le vide de la vie, notamment, au printemps, saison du renouveau et du bonheur, quand l'amour semble impossible : "A quoi bon vivre au mois de mai"...
Le thème de "l'attente" vient renforcer la douleur, quand la vie se résume à "nommer" quelqu'un sans l'atteindre, un être insaisissable, comme le suggère l'oxymore "toujours même et différente".
Le poète est, de plus, seul responsable de cet amour inaccessible, il ne peut que s'en "blâmer", verbe très fort qui aggrave le malheur.
La quête se transforme en une sorte d'errance immobile, un oubli de la vie et finalement devient synonyme d'une mort qui n'en finit pas...
La mélodie douce et mélancolique s'intensifie dans le refrain, comme pour souligner toutes les souffrances de l'amour...
Photo : rosemar