Dans un de ses poèmes célèbres, Lamartine imagine que les voix des morts se révèlent à travers les souffles du vent, les brins d'herbe qui frissonnent, les pins qui bruissent, une cloche qui résonne, des flots qui se répandent sur la grève...
Les voix qui se sont tues semblent, alors, se ranimer dans la nature entière, des voix, des rires, des paroles entendues, des souvenirs qui restent en chacun de nous...
Des visages ressurgissent du passé, des gestes, des sourires, des conversations, des moments d'autrefois.
Mes grands-tantes, mes grands-parents, disparus si vite, nos parents.
Des visages qui ont été si proches se sont éloignés, il nous reste tant de souvenirs, tant de pensées pour eux !
Il nous reste, gravés dans nos mémoires, leurs joies, leurs peines, leurs émotions, leur sensibilité, leur amour de la vie et du monde...
Il nous reste leur empreinte, leurs idées, une façon de vivre, dans la simplicité...
Le monde s'accélère, les progrès se multiplient, la vie s'emballe, mais nous aimons tous revoir des souvenirs tendres du passé.
Ceux dont les voix se sont tues font partie de nous, ils sont une part essentielle de notre âme et de nos coeurs.
Ils sont là, parmi nous, ils revivent à travers nos souvenirs...
On revoit des paysages familiers, la campagne aixoise si belle, aux couleurs d'ocre et de rouille, à l'automne, le pays de mes grands-parents maternels.
On revoit le pays d'Aix, des villages aux noms si parlants et pittoresques, Cabriès, Bouc-bel-Air, Violési, les Chabauds...
On perçoit des senteurs marines, celles de l'Estaque, petit village de pêcheurs, où ont vécu mes parents, on admire des embruns marins, des flots aux murmures sans cesse renouvelés...
On entrevoit, sur l'eau, une barque, peuplée de filets, de salabres, de bâches, de jambins.
Des calanques aux rochers abrupts se dessinent, des pins qui se penchent vers la mer, des collines lumineuses...
On revoit un jardin envahi de roses, de jasmins, d'althéas, des couleurs vives ou légères, on s'enivre de parfums de menthe, de romarins, de gardénias.
Une maison d'autrefois, dans un écrin de verdures : oliviers, thuyas, cyprès...
Des brassées de fleurs, dans le jardin, des brassées de senteurs, des joies simples, des bonheurs ordinaires et familiers...
Le poème de Lamartine : Pensée des morts
http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/alphonse_de_lamartine/pensee_des_morts.html
Le poème repris par Georges Brassens :
http://www.jukebox.fr/georges-brassens/clip,pensee-des-morts,vmr5r.html
Un extrait du poème de Lamartine :
"Ah ! quand les vents de l'automne
Sifflent dans les rameaux morts,
Quand le brin d'herbe frissonne,
Quand le pin rend ses accords,
Quand la cloche des ténèbres
Balance ses glas funèbres,
La nuit, à travers les bois,
A chaque vent qui s'élève,
A chaque flot sur la grève,
Je dis : N'es-tu pas leur voix ?
Du moins si leur voix si pure
Est trop vague pour nos sens,
Leur âme en secret murmure
De plus intimes accents ;
Au fond des coeurs qui sommeillent,
Leurs souvenirs qui s'éveillent
Se pressent de tous côtés,
Comme d'arides feuillages
Que rapportent les orages
Au tronc qui les a portés..."
Photos : rosemar