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20 septembre 2024 5 20 /09 /septembre /2024 12:21
Emportés par la foule...

 

Une rencontre éphémère qui laisse pourtant un souvenir inoubliable... tel est le thème de cette chanson célèbre : La foule...  le personnage principal est plongé dans une foule, dans une ambiance de fête et de joie où se mêlent différentes sensations fortes, d'abord une sensation visuelle éblouissante qui reste gravée à jamais dans la mémoire, comme le suggère l'emploi du présent dans la majeure partie du texte :

"Je revois la ville en fête et en délire
Suffoquant sous le soleil et sous la joie"

L'emploi de la première personne du singulier "je" permet à chacun de s'identifier à la narratrice.

Puis, c'est une sensation auditive qui est évoquée avec toujours autant d'acuité, où l'on retrouve tous les éléments de la fête : la musique, les cris, les rires...
"Et j'entends dans la musique les cris, les rires
Qui éclatent et rebondissent autour de moi"

Les sonorités de gutturales assez fortes restituent aussi les bruits de cette fête : "musique, cris, rires, qui éclatent, rebondissent autour"

Isolée parmi la foule, la narratrice se retrouve bien seule face à des gens inconnus : l'emploi de la première personne du singulier "je", opposée au pluriel "ces gens" souligne bien l'isolement de la jeune femme.

Elle ne peut échapper à ce mouvement de foule et les termes "Etourdie, désemparée" soulignent son désarroi...

Une rupture intervient alors avec une subordonnée de temps :

"Quand soudain, je me retourne, il se recule
Et la foule vient me jeter entre ses bras"

C'est ainsi  que deux individualités se trouvent et se rencontrent avec l'emploi des pronoms "je", "il" au singulier. Et c'est alors qu'apparaît une nouvelle sensation, tactile cette fois, puisque la narratrice se retrouve entre les bras de l'inconnu...

Les deux personnages sont malgré eux emportés dans le tourbillon de la foule, à tel point qu'ils deviennent "un seul corps", dans une union et une fusion parfaite.

"Emportés, écrasés", les personnages éprouvent pourtant le comble du bonheur, comme le montre ce rythme ternaire insistant : "tous deux épanouis, enivrés et heureux". Ce contraste dans le vocabulaire souligne bien l'attraction irrésistible que connaissent les personnages.

Dans le couplet suivant, on perçoit un élan, un enthousiasme et un bien être de se trouver dans cette foule en train de s'élancer et de danser une folle farandole : les sonorités de voyelles nasalisées "an" peuvent restituer cette envolée de bonheur... et les termes utilisés très forts montrent encore une union volontaire cette fois, et partagée par les deux personnages : "nos deux mains restent soudées, nos deux corps enlacés".

Les corps qui s'envolent restituent une envolée de bonheur, une exaltation. Et la joie se propage entre les deux personnages, le vocabulaire  hyperbolique et imagé vient souligner l'intensité de cette joie qui irradie et se transmet avec force :

"Et la joie éclaboussée par son sourire
Me transperce et rejaillit au fond de moi"

Le cri poussé par la jeune femme dans le vers suivant est d'autant plus surprenant et inattendu dans cette ambiance de joie.

L'explication est donnée dans la subordonnée de temps :

"Quand la foule vient l'arracher d'entre mes bras
Emportés par la foule qui nous traîne
Nous entraîne, nous éloigne l'un de l'autre"

Triste ironie du sort ! La foule qui a d'abord rapproché les deux personnages, qui a permis leur rencontre, les sépare irrémédiablement. Dès lors, la joie intense laisse place à des sentiments totalement opposés tout aussi intenses : "douleur, fureur, rage".

Et alors que la foule continue à danser dans une atmosphère de rires et de fête, en contraste, la douleur de la narratrice est d'autant plus forte...

On la voit "crisper (ses) poings, maudissant la foule qui (lui) vole
L'homme qu'elle (lui) avait donné qu'(elle) n'a jamais retrouvé"

 

La chanson décrit bien la magie d'un instant de rencontre, un instant inoubliable et intense... et la désillusion de la séparation. Et bien sûr, on perçoit l'indifférence de la foule face au déchirement de cette absence soudaine qui passe inaperçu au regard de la foule... amour, solitude, force irrésistible de la foule, anonymat du monde moderne et de nos sociétés, fragilité des rencontres et du bonheur, de nombreux thèmes sont perceptibles dans cette chanson...

 

La mélodie restitue merveilleusement les mouvements irrésistibles de cette foule qui danse...

 

 

 Pour mémoire :

La Foule est une chanson enregistrée par Édith Piaf en 1958. Les paroles sont de Michel Rivgauche et la musique d'Ángel Cabral. Il s'agit de l'adaptation de Que nadie sepa mi sufrir, valse péruvienne rendue populaire par des chanteurs argentins, et composée en 1936 par Ángel Cabral sur des paroles d'Enrique Dizeo. Après le succès de l'adaptation française, la version originale a été remise à la mode sous le titre espagnol Amor de mis amores. La chanson a été reprise par de nombreux artistes, en français comme en espagnol, mais aussi dans d'autres langues.

 

Les paroles :

 

https://www.paroles.net/edith-piaf/paroles-la-foule

 

 

 

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commentaires

L
Vieille chanson mais toujours vivante et éternelle.
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R
Une musique pleine de vivacité et d'élan : on se laisse entraîner par la foule, comme la narratrice de la chanson.<br /> J'aime bien la version à l'accordéon.
A
Merci pour ces commentaires sur une des plus belles chansons de Piaf. Une chanson qui est un vrai tourbillon et dont on sort complètement rincé !<br /> De manière générale la foule et la liesse populaire sont propres aussi à générer des angoisses. <br /> Je ne compte pas le nombre incroyable de films dans lesquels des scènes très stressantes et angoissantes se déroulent dans des atmopshères de liesse populaire. Les réalisateurs aiment jouer sur ces contrastes.<br /> Quand la joie de la foule éclate le drame n'est jamais loin...comme la scène finale du film LA PEAU dans laquelle la foule acclame l'arrivée des chars libérateurs américains et qu'un passant se fait écrabouiller par un des chars. Je ne t'ai pas mis en lien la scène en question car elle est vraiment trop horrible et il faut avoir le coeur bien accroché...<br /> La semaine dernière j'écoutais Kersauzon qui expliquait qu'il aimait bien la compagnie des gens mais qu'il ne supportait pas les foules...Une vraie phobie...<br /> Et moi aussi je suis atteint d'une certaine phobie des foules. La dernière fois que je me suis retrouvé dans une foule, le public avait hué l'artiste israelienne de l'eurovision et je me suis barré...Comme disait Brassens: dès qu'on est plus de 3 on est une bande de cons...<br /> Bien évidemment il y a des foules qui ne stressent pas. Par exemple celui de la Fête de l'Huma...en général c'est très cool...
Répondre
R
Une musique entraînante qui évoque bien cet élan irrésistible de la foule, des thèmes entrelacés, des émotions diverses, contraires... une chanson riche de sens...<br /> <br /> Merci pour ces réflexions sur la foule, et ses dangers...<br /> <br /> Belle soirée, AJE

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