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10 mars 2025 1 10 /03 /mars /2025 13:10
Donald Trump : les mots (et les maux) du fascisme...

Olivier Manonni a publié en 2022 : Traduire Hitler, et en octobre dernier Coulée brune. Comment le fascisme inonde notre langue.

Il était l'invité de France Culture lors de l'émission Questions du soir, le débat...

 Olivier Manonni : "Je me suis aperçu qu'aux Etats-Unis, notamment dans les discours de campagne de Donald Trump, revenaient des phrases que j'avais traduites dans Mein Kampf et qui revenaient littéralement... ce n'étaient même plus des analogies, c'étaient des phrases qui sortaient de ce livre épouvantable, que j'ai essayé de faire ressortir dans le contexte. Une phrase isolée ne veut absolument rien dire, mais quand elles sont trois, quatre ou cinq et quand elles correspondent à un certain nombre d'idées qui sont propagées par un responsable, on peut commencer à se poser des questions..."

 

"Est-ce que Trump a quelque chose d'Hitler ?" interroge alors le journaliste.

Olivier Manonni : "Quelque chose d'Hitler, je n'irai pas jusque là. C'est plus complexe que cela. Ce que je sais, c'est que dans son langage s'est imposée, au fil du temps, une terminologie qui est directement celle d'extrême droite fascisante et depuis peu de temps, depuis quelques mois, une terminologie qui vient directement du nazisme.

J'en donne des exemples dans mon livre : parler de migrants comme d'animaux, dire qu'ils vont contaminer le sang des Etats-Unis, ce sont des expressions qui sortent directement de la phraséologie nazie et des termes utilisés dans Mein Kampf.

La question que je me pose, c'est dans quel but il fait ça et surtout qui l'incite à le faire, parce que je doute très fortement que Donald Trump ait lu Mein Kampf... et aussi qu'est-ce que cela veut dire concrètement.

Et quand on aligne ces citations avec les actes qu'il a accomplis ou qu'il veut accomplir, on arrive tout de même à un tableau très inquiétant.

Il y a six mois quand mon livre est sorti, les gens me disaient : "Mais vous dites n'importe quoi..." Aujourd'hui, il est quand même près d'envahir le Panama, le Groenland et le Canada. C'est quand même des éléments qui, avec ce langage là derrière, peuvent poser de très sérieuses questions sur ses intentions...

C'est quelqu'un qui en général exprime ce qu'il veut faire. La présence de ces traces très nombreuses, maintenant, de langage fasciste ou nazi dans son discours et les actes qui suivent sont, pour moi, très inquiétants...

"Nous ne sommes pas dans des structures de pouvoir comparables sur un parti unique, les SA, les SS, etc... mais il y avait un charisme de Hitler et il y a aussi un charisme de Trump, c'est ça qui est le plus troublant." complète Olivier Wieviorka, autre invité de l'émission.

Un discours de Trump est ensuite diffusé pour analyse : "Avec votre aide, votre amour et votre vote, nous ferons passer l'Amérique en premier... nous vous promettons d'éradiquer les communistes, les marxistes, les fascistes et les voyous de la gauche radicale qui vivent comme de la vermine dans les confins de notre pays, qui mentent, volent et trichent lors des élections et qui feront tout ce qui est possible, légalement ou illégalement pour détruire l'Amérique et le rêve américain."

Pour Olivier Manonni, c'est "un texte absolument terrifiant... d'abord, ce terme de l'Amérique au dessus de tout, c'est un écho d'un extrait de l'hymne allemand que les nazis avaient porté au pinacle, c'est le premier point.

Deuxième point : dans ce que dit Trump, au delà de la violence extrême de ce qu'il dit, il traite ses adversaires, pas des ennemis, de vermines et quand il parle de cela, il utilise deux mots que je connais très bien : en anglais, il dit "éradiquer", c'est le calque du mot allemand qui était un des euphémismes utilisés par des nazis pour parler de l'extermination des juifs. Le terme de "vermine" sort aussi directement de la phraséologie nazie.

Donc, outre la violence, cela fait partie de ces très nombreuses influences qui remontent de cette période qu'on décèle dans les textes, dans les discours de Donald Trump.

Tout cela est profondément pensé, par exemple, par quelqu'un comme Steve Bannon. Et il y a aussi les dérapages gestuels : on a ce geste qu'a fait Elon Musk qui était à mon avis sans aucune espèce de doute un salut nazi, destiné à ses partisans, puis le geste de Steve Bannon qui a récidivé pendant le congrès des conservateurs...

On lit de plus en plus sur les réseaux sociaux cette phrase : "Finalement Hitler, il a fait du travail."

Ils utilisent cette phraséologie pour s'ouvrir les portes d'un pouvoir absolu. Ce n'est pas un retour du nazisme mais je pense qu'on utilise ces courants qui sont extrêmement dangereux pour justifier des choses qui, à terme, vont aussi pouvoir être abominables : on parle quand même d'expulser 11 millions de personnes des Etats-Unis, on parle de déporter 2 millions de Gazaouis hors de leur pays pour les mettre on ne sait où. On est, dans les faits annoncés, dans des choses d'une violence qui ne se limite pas du tout aux mots...

Hyperpersonnalisation du pouvoir, pouvoir très autoritaire... si ce n'est pas du fascisme, disons que ça y ressemble beaucoup..." rajoute Olivier Mannoni.

 

 

Source :

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/questions-du-soir-le-debat/1938-2025-est-il-sense-de-comparer-les-deux-periodes-8301730

 

 

 

Donald Trump : les mots (et les maux) du fascisme...
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commentaires

A
Dans les éléments constitutifs du discours Trumpien il y a une particularité historiquement inhabituelle qui lui est propre et que tu as déjà commenté dans tes articles précédents: la frivolité.<br /> Trump est le seul grand dirigeant qui se permet de se contredire en moins de 48 heures sans que ça ne porte à conséquences.<br /> Normalement tous les leaders politiques ont peur de l'hémérothèque car celle-ci peut mettre en évidence le manque de cohérence de leurs discours mais Trump réussit à se rire de tout cela sans que ça ne choque ses partisans.<br /> Un jour il traite Zelensky de dictateur...et un autre jour il dit: " J'ai dit ça, moi ? ".<br /> Cette frivolité aboutit à un certain relativisme de la vérité qui peut être aussi changeante que la météo...<br /> Cette frivolité charrie de graves conséquences car elle installe un chaos dans le chaos (chaos est à prendre au sens mathématique et se caractérise par une haute imprévisibilité).<br /> <br /> Cette frivolité installe aussi une forme grave d'arbitraire: " C'est comme ça parce que c'est moi qui le dit et demain ça sera peut-être autrement si mon intrérêt du moment l'exige..."<br /> En cela la phrase de Claude Malhuret (que Caius éxècre) comparant Trump à Caligula me paraît pertinente. La scène souvent vue dans les péplums dans laquelle le peuple romain ne sait pas si le pouce de l'empereur donnera la vie sauve au gladiateur mis à terre s'applique à Trump.<br /> <br /> Cette perversion du rapport au réel et à la vérité se retrouve dans le roman 1984 d'Orwell dans laquelle l'histoire est constamment réécrite. Mais Trump n' a pas à réécrire ou à effacer l'histoire, il s'en rit et personne ne trouve à redire.
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R
Merci, AJE, pour toutes ces réflexions sur le discours Trumpien : un discours qui "trompe" à tout va... une méthode de vente ?
A
Rien que pour la plaisir, le discours saignant de Claude Malhuret, discours qui est devenu viral même aux Etats-Unis où il a été entendu des dizaines de milliers de fois.<br /> <br /> https://www.youtube.com/watch?v=G599xZbMyvI<br /> <br /> Washington est devenu la cour de Néron...
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A
Merci Caius pour cet interview de Mearsheimer. Finalement il dit implicitement que les ukrainiens doivent assumer la présence de leur voisin impérialiste et qu'ils ne peuvent disposer d'eux-mêmes sous peine d'être détruits, rejoignant en cela ce que disait Zemmour durant sa campagne. Il appelle ça du réalisme, et moi je parlerais plutôt d'un cynisme profondément immoral... <br /> Un pays n'a pas à supporter une telle malédiction et c'est ce qu'ont fait la Pologne ou les Etats Baltes.<br /> <br /> Le fait que les USA tournent le dos à un siècle d'alliance avec l'Europe ne semble pas le perturber davantage que ça. Il n'y voit pas un danger de grand désordre mondial, ni une perte de leadership des USA.<br /> Il parle de Trump comme si les USA allaient définitivement adhérer à sa vision et à son projet. Pour ma part je préfère imaginer que Kersaudy (dont j'ai mis un extrait d'interview dans un de mes commentaires) ne se trompe pas quand il prévoit de très grosses déconvenues à mi-mandat.
R
Merci, Caius, pour ce point de vue d'un Américain... qui critique tout de même Trump :<br /> <br /> DER SPIEGEL : Vous mettez en garde depuis longtemps contre les « illusions » libérales sur l’état du monde. Donald Trump n’est pas intéressé par l’OTAN, l’ONU ou d’autres institutions internationales chères à de nombreux libéraux. N’est-il pas le genre d’homme politique que vous aimez ?<br /> <br /> Mearsheimer : Non. Les réalistes aiment les institutions. Les États-Unis ont créé de nombreuses institutions importantes pendant la guerre froide, notamment l’OTAN, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. Si vous êtes les États-Unis et que vous devez mener la guerre froide ou que vous voulez diriger le monde, vous ne pouvez pas le faire sans institutions. Il faut des règles. Je pense que Trump commet une erreur en saccageant les institutions et en traitant ses alliés avec mépris.
R
Merci pour cet extrait du discours de Malhuret qui a fait beaucoup de bruit...
C
Voici les réflexions de John Mearsheimer qui sont tout de même plus intéressantes que les exécrations de ce Malhuret<br /> <br /> https://arretsurinfo.ch/trump-et-vance-meprisent-les-europeens/
A
Théoriquement d'après l'historien François Kersaudy on a 2 années dangereuses à passer car ensuite, à mi-mandat, Trump va accumuler les déconvenues y compris avec sa propre administration...<br /> <br /> https://www.atlantico.fr/article/decryptage/apres-le-guet-apens-de-la-maison-blanche-diplomatie-russie-etats-unis-europe-ukraine-Trump-Poutine-Zelensky-Francois-Kersaudy<br /> <br /> <br /> https://www.lexpress.fr/idees-et-debats/donald-trump-se-heurtera-rapidement-a-des-deconvenues-par-francois-kersaudy-3YPKQLLMDJHDPGX3SAWDRX3J5A/<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Extrait de son article dans ATLANTICO et paru également dans l'EXPRESS…<br /> <br /> "Et pourtant, c’est bien à quoi la communauté internationale médusée assiste en ce début de 2025. Au-delà des indignations, des accusations et des flagellations médiatiques inévitables après un tel séisme, quelques considérations jusqu’ici négligées paraissent s’imposer : d’une part, il est certain que Donald Trump – qui aurait, selon son ancien ministre de la Défense James Mattis, « le comportement et l’entendement d’un gamin de dix ou onze ans » -, est parvenu à stupéfier Américains et Européens par un mélange totalement inédit de mensonges flagrants, de décisions brusquées et de menaces grossières ; mais une fois passés les premiers mois de sidération, il se heurtera fatalement dans son pays à l’institution judiciaire, au Congrès, à l’administration et à la presse – le tout rapidement amplifié par d’inévitables règlements de comptes au sein de son entourage. Par ailleurs, les déconvenues à venir de son rapprochement baroque avec l’ancien officier du KGB Vladimir Poutine, jointes à l’échec prévisible de sa tentative d’alliance russo–américaine contre la Chine, ne manqueront pas de créer confusion et résistance au sein de la CIA, du Pentagone et du département d’État – ce que l’amateurisme de leurs nouveaux responsables ne pourra qu’aggraver. Enfin, ses entreprises de flibusterie commerciale à l’international, avec leurs inévitables répercussions délétères aux États-Unis, créeront rapidement un fort mécontentement dans le pays, dont les effets se feront sentir lors des élections législatives à mi-mandat – et au-delà…."<br /> <br /> Puisse Kersaudy avoir raison même si ces 2 ans risquent d'être interminables et avoir de lourdes conséquences...
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R
Merci pour ces liens et cet extrait, AJE.
A
C'est bien observé de la part de Manonni. Trump utilise de vieilles recettes éprouvées. <br /> Ton article va aussi dans le sens de ce que dit Roger-Pol Droit dans son livre QUAND LA PAROLE DETRUIT.<br /> Avant de détruire réellement les personnes il faut préalablement le faire avec des mots.<br /> Extrait:<br /> "Annulation de l’autre<br /> Dénonciations mensongères, tromperies, manipulations, fausses<br /> rumeurs, ragots, insinuations, perfidies, allusions corrosives, diffamations,<br /> injures, dépréciations, sous-entendus, moqueries, omissions volontaires,<br /> accusations sans objet, critiques infondées, disqualifications, intimidations,<br /> trahisons, calomnies… Il existe une immense variété d’usages nocifs de la<br /> parole. La liste pourrait encore se poursuivre indéfiniment."<br /> <br /> Trump utilise sans complexes toute la gamme des usages nocifs de la parole.
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R
"La parole peut être la meilleure et la pire des choses", écrivait Esope. Et avec les réseaux sociaux, ses pouvoirs sont amplifiées... Merci pour ce conseil de lecture et ces extraits.<br /> <br /> <br /> https://www.babelio.com/livres/Droit-Quand-la-parole-detruit/1447785<br /> <br />
L
C'est effrayant de se dire qu'après la seconde guerre mondiale, tous les progrès en démocratie, liberté, égalité, fraternité, laïcité, ne sont finalement jamais acquis pour toujours.<br /> <br /> À tout moment et par la volonté d'un seul homme élu ou pas, on retourne au communisme, au nazisme ou au fascisme, ou encore vers une théocratie...<br /> <br /> Je disais hier dans un groupe d'amis de ma nationalité première où l'on discutait des massacres de la veille : <br /> «Je rends grâce à la Providence que j'ai pu vivre le plus clair de mes années dans une democratie., sans frayeurs. C'est une chance non méritée.»
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L
Syrie, puis Venezuela, et la France...
R
Les démocraties sont bien fragiles et les régimes autoritaires gagnent du terrain.<br /> Quelle est ta nationalité première, LH ?

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