L'enfance, ses bonheurs, les souvenirs, le temps qui passe, la tendresse d'un père, tant de thèmes sont évoqués dans cette chanson de Renaud : Mistral gagnant...
Le texte écrit à la deuxième personne se présente sous la forme d'un discours familier et tendre, adressé à un enfant...
Le temps d'une pause dans la vie trépidante qui nous emporte, le temps de s'asseoir "cinq minutes sur un banc", de "regarder les gens"... Renaud suggère, là, des bonheurs quotidiens, banals : "parler du bon temps d'autrefois" à son enfant, "serrer ses petits doigts"...
Vivre un instant fugace, en observant le monde, les gens qui passent, des pigeons idiots à qui on donne à "bouffer"..., s'amuser comme un gosse "à leur filer des coups de pieds pour de faux"... et rejoindre ainsi le monde de l'enfance...
Le bonheur, aussi d'entendre, le rire de l'enfant qui "lézarde les murs", car ce rire éclaire le monde et semble même l'ébranler et le modifier !
Cette image forte restitue bien tous les pouvoirs de l'enfance...
Ce rire salvateur, bénéfique parvient, d'ailleurs, à "guérir toutes les blessures."
Le bonheur de parler, de raconter des souvenirs d'enfance, quand on était "minot", un terme familier qui renvoie bien à toute la tendresse de cet âge...
C'est un âge fait d'insouciance, de légèreté, que nous raconte Renaud, comme le montrent bien les souvenirs évoqués : les sucreries, les bonbons transformés en "bombecs fabuleux", véritables objets de convoitise qu'on "piquait chez le marchand"...
L'énumération de ces gourmandises retranscrit toute une époque passée :
"Car-en-sac et Mintho caramels à un franc
Et les Mistrals gagnants"...
Les Mistrals gagnants, surtout... , des confiseries aujourd'hui disparues, une poudre sucrée contenue dans un sachet, une "biberine" que l'on aspirait grâce à un petite paille en réglisse... Si à l'intérieur on trouvait la mention "gagnant", on avait droit à un nouveau "bonbec"gratuit.
Renaud évoque, également, le bonheur tout simple de marcher sous la pluie, tout en regardant le monde, "la vie", de parler encore de la "terre", de ses merveilles...
Le bonheur de la complicité avec son enfant, le bonheur de lui "bouffer les yeux" pour s'imprégner de son image rayonnante. le plaisir de "sauter dans les flaques", comme pour vivre intensément le moment présent et, entendre les reproches de la mère qui "râle" de ces enfantillages...
Et, bien sûr, le rire de l'enfant fait partie de ces moments privilégiés, il est, cette fois, comparé au bruit que fait la mer, belle image qui retranscrit une harmonie.
Puis, c'est le retour vers les souvenirs d'autrefois, à nouveau le temps des friandises, à travers une énumération :
"Te raconter surtout les carambars d'antan et les coco-boers
Et les vrais roudoudous qui nous coupaient les lèvres et nous niquaient les dents
Et les Mistrals gagnants..."
Des friandises dont l'enfant ne percevait pas encore tous les effets, mais qui étaient un véritable réconfort et qui symbolisent, à merveille, toutes les douceurs de l'enfance.
Le "banc", sur lequel on revient, symbolise bien, aussi, ce moment d'arrêt qui permet d'observer le monde et "le soleil qui s'en va"représente le temps qui passe inexorablement.
Cette pause sur le banc offre encore l'occasion de communiquer, de parler "du bon temps qu'est mort"...
On perçoit là toute la nostalgie et la mélancolie du poète, une mélancolie qu'il veut effacer en affirmant "qu'il s'en fout".
Le rire de l'enfant est, ensuite, assimilé à des cris d'oiseaux qui s'envolent haut dans le ciel, comme pour le magnifier et en montrer toute la force.
La chanson s'achève sous la forme d'un message adressé à l'enfant, d'abord une sorte de mise en garde : "les méchants, c'est pas nous...", cette phrase révèle, de manière implicite, l'existence de ces "méchants" dont il faut, tout de même, se méfier et se prémunir...
Mais le message ultime est encore plus fort, c'est une invitation à profiter du bonheur présent, avec intensité : il faut "aimer la vie, même si le temps est assassin... lui qui emporte les rires des enfants et les Mistrals gagnants..."
La mélodie, au piano, égrène des notes simples et limpides... lumineuse, elle restitue, à la fois, les bonheurs de l'enfance et toute la mélancolie du poète.
Le texte :
http://www.parolesmania.com/paroles_renaud_9473/paroles_mistral_gagnant_331485.html
Photo : rosemar