Les commentaires de Marine Le Pen, sur Europe 1, après la libération des otages français du Niger ont suscité bien des réactions. De fait, ils sont assez consternants : la présidente du FN s'est appliquée à commenter l'habillement, la tenue des otages : elle dit avoir ressenti un "malaise "en découvrant les images des otages...
A la question : "Vous avez été touchée en les voyant ?"Marine Le Pen repond qu'elle est dubitative, qu'elle a été étonnée par l'attitude réservée de ces ex-otages : des hommes qui portaient une barbe taillée de manière surprenante, l'un se cachait le visage...
Elle affirme même que beaucoup de français ont ressenti la même impression... Elle attend aussi des explications de leur part.
Au lieu de partager une émotion, Marine Le Pen est dans la suspicion : les otages auraient-ils été islamisés par leurs geôliers ?
Certes, en les voyant, on peut comprendre que 3 années de détention les ont forcément marqués physiquement... La fatigue s'imprime sur les visages, les traits sont tirés, la barbe est mal taillée : quoi de plus normal ?
On est tout de même étonné d'entendre ce mot de "malaise" alors que la libération d'otages devrait donner lieu à des manifestations de joie, de soulagement : le bonheur des familles faisait plaisir à voir, on sentait des émotions très intenses dans ces retrouvailles...
Comment ne pas compâtir devant le sort de ces otages ? Comment peut-on déjà les soupçonner d'une quelconque collusion avec des islamistes ?
Marine Le Pen insiste sur la réserve des otages, qu'elle ne comprend pas : mais, enfin, cette discrétion paraît pour le moins normale pour des hommes qui ont subi 3 années de détention, qui sont éprouvés et fatigués...
En fait, Marine Le Pen refuse, par là même, de voir dans cette libération, dans ce retour des otages un événement qui devrait susciter une quelconque émotion...
Voilà une curieuse approche de cet événement ! Demander à des otages des explications sur leur attitude, sur leur vêtement me paraît relever de la plus grande maladresse...
Ces otages ont souffert, ont été privés de liberté, ont connu les pires angoisses et les voilà sommés de s'expliquer sur leur tenue vestimentaire, sur leur barbe !
Sans doute, Marine Le Pen, dans un esprit d'opposition permanente, refuse-t-elle de se réjouir, d'éprouver de l'émotion face à ce retour des otages mais on perçoit là un manque de sensibilité assez inquiétant : Marine Le Pen ne commente que l'apparence extérieure : vêtements, barbe et ne s'intéresse nullement aux sentiments que peuvent éprouver ces hommes, à leur désarroi, leur détresse pendant ces 3 années de captivité loin de leurs familles...
En entendant de tels propos, de toute évidence, c'est nous qui éprouvons un certain "malaise" et même une certaine indignation : comment ne pas être choqué par ces propos qui visent à stigmatiser des otages , à les suspecter ?
Devant la consternation suscitée par ces déclarations, Marine Le Pen a ensuite tenté de se justifier :" Il faut rompre avec ce qui est devenu une tradition française profondément malsaine d'instrumentalisation politique des libérations d'otages. Elles ne sont ni des meetings électoraux ni des émissions de téléréalité", lance-t-elle. "Il serait bon que nos dirigeants s'en souviennent".
Marine Le Pen, on le voit, reste dans la polémique : n'est-il pas normal de diffuser des images du retour à la liberté des otages ? Peut-on parler d'instrumentalisation ?
Où se trouve donc l'humanisme, où se trouve la compassion dans de tels propos ? N'est-on pas en droit d'éprouver un certain malaise face à de telles réactions ?
Où est le malaise ?