L'obsession d'un amour perdu, le désarroi, la solitude imprègnent cette chanson de Francis Cabrel, dont la mélodie teintée d'une douceur mélancolique émeut chacun d'entre nous.
"Je pense encore à toi", tel en est le titre révélateur : le poète, esseulé, entre dans une église, espérant, sans doute, trouver un réconfort, mais il ne perçoit que le "regard" vide et "éteint de statues".
L'emploi du pronom "je" réitéré traduit une forme de solitude, d'autant que l'auteur ne rencontre que ce "regard éteint du plâtre des statues".
Le poète évoque, alors, un endroit où "il n'y a rien au dessus", peut-être, un univers appartenant au passé, où l'amour comblait tous les désirs, sans que l'on ait besoin de prier un quelconque dieu.
Des regrets interviennent, avec l'emploi du conditionnel passé, "j'aurais dû", le poète aurait dû percevoir certains dangers de la passion amoureuse symbolisés par des "vents qui tourbillonnent", ou encore, par "des pierres qui taillent cachées sous l'eau qui dort."
Tempêtes, pierres coupantes représentent bien les difficultés de l'amour, fait souvent de tourments, de blessures.
En même temps, ces images qui évoquent la nature sont empreintes de beauté, de poésie et d'harmonie... Elles retranscrivent, aussi, tous les charmes attirants de l'amour.
Une autre métaphore suggère toute la lente construction du sentiment amoureux, dans l'expression " des bouts de ruisseaux qui deviennent des ports."
Le pronom indéfini "on" utilisé par le poète renvoie à l'opinion commune : "on m'avait dit que tout s'efface". Mais, on voit bien que le souvenir ne parvient pas à disparaître dans un amour qui est si intense.
Le thème du temps qui passe apparaît, alors : le mot répété traduit l'écoulement, la fuite du temps... Seul le temps permettra, peut-être, d'atténuer la douleur et les souffrances de l'amour perdu...
Les voyelles nasalisées restituent bien ce lent écoulement : "longtemps, heureusement, le temps passe, je pense encore..."
La rencontre d'un mendiant, à la fin de la chanson, renvoie au poète sa propre image : comme lui, il est couvert "d'un manteau de pluie", symbole de tristesse, comme lui, il a perdu sa route.
Et l'image de la femme aimée revient de manière obsessionnelle : elle est même "plantée" dans les yeux de l'amoureux, terme très fort qui suggère une fusion.
Le refrain bref et simple exprime le refus de l'oubli ou plutôt son impossibilité : "Je pense encore à toi".
La mélodie, emplie de tendresse et d'émotion, restitue à la fois douceur et désarroi.
La simplicité du texte, sa brièveté même, le refrain insistant traduisent une infinie mélancolie...
Photo : rosemar