Il s'appelle Pavel Filatiev, ce soldat russe a fui la Russie, refusant une guerre qu'il juge désastreuse et inutile...
"A son arrivée en France, dans les toilettes de l'aéroport Paris Charles de Gaulle, le premier geste symbolique de Pavel Filatiev est de détruire tous ses papiers :
"Voilà, ce sont mes papiers, ma carte d'identité militaire", dit-il, en se filmant avec son portable et il déchire le document...
"Mon passeport de citoyen russe..." Et il le déchire à nouveau. Puis il jette le tout dans la cuvette des toilettes...
"J'aime la Russie, j'aime les Russes, mais Poutine n'est pas la Russie, le gouvernement n'est pas la Russie... Poutine, va te faire voir !", déclare le militaire.
Après 48 heures dans un centre de rétention, des journalistes rencontrent l'ancien militaire de 34 ans, désormais considéré comme déserteur par la Russie...
Il va faire avec son avocate une demande de droit d'asile. Son témoignage est accablant sur la guerre en Ukraine, menée par Vladimir Poutine :
"On s'entretuait entre militaires russes et ukrainiens, mais je voyais qu'on était aussi en train de tuer des civils, il y a eu beaucoup de civils tués..
Bien sûr, j'ai pu être cruel parfois, mais je ne pouvais pas accepter ce qui se passait : nous arrivions et nous détruisions des villes entières, on rasait tout."
Pavel Filatiev était un soldat d'élite, un commando parachutiste, il affirme n'avoir commis aucune exaction. Il était prêt à mourir pour son pays, mais après deux mois de guerre en première ligne, il dénonce une guerre inutile.
"Aujourd'hui, beaucoup de militaires russes refusent tout simplement d'aller à la guerre, et ceux qui y vont n'ont pas de motivation. C'est pour cela que Poutine essaie de recruter des gens en prison et des vieux."
Blessé en mai, le soldat d'élite est écarté de la ligne de front. Finis les tranchées et les combats, c'est à l'hôpital qu'il va commencer à écrire sur la guerre.
Son récit est intitulé ZOV, un appel à l'aide équivalent à un SOS : il y raconte la désorganisation de l'armée russe et les morts inutiles.
Un site internet russe publie des extraits puis la chaîne d'un militant des droits de l'homme invite Pavel Filatiev.
"Vous êtes le seul à briser le silence dans l'armée russe. Est-ce qu'aujourd'hui vous êtes devenu l'homme à abattre ?" interroge une journaliste.
"Moi, je voulais juste réveiller les consciences, que les gens se rendent compte de ce qui est vrai... Si vous allumez la télévision, vous allez entendre les Russes dire qu'ils chassent les nazis d'Ukraine, que cette opération, c'est pour libérer la population de ces nazis.
J'ai appris que mon commandement avait demandé 15 ans de prison pour moi, en m'accusant de diffamation contre l'armée. Mais se retrouver en prison en Russie, c'est être à la merci de l'état : on peut être torturé, humilié... c'est une bonne raison pour quitter le pays.
J'étais devenu pour eux un traître, un ennemi."
Dès lors, il a peur pour sa vie et doit quitter le pays dès que possible... après un mois de cavale, il est exfiltré par des lanceurs d'alerte et est arrivé à Paris, il y a quelques jours.
"Aujourd'hui, je pense que beaucoup de Russes ne veulent pas de cette guerre, malgré ce que raconte le pouvoir. L'Ukraine, c'est une honte pour notre pays.", déclare encore Pavel Filatiev.
“Je sais que je ne peux pas dire le mot ‘guerre’. C’est interdit. Mais je le dis quand même : c’est la guerre. Les soldats des deux camps meurent, tout comme les civils qui ont la malchance de vivre dans un pays contre lequel on a lancé cette guerre, appelée ’opération militaire spéciale’. J’ai 33 ans maintenant et toute ma vie je n’ai dit que la vérité.”
Ainsi commence le récit de ce témoin de la guerre en Ukraine.
Il y dépeint une armée russe en lambeaux, à peine équipée et manquant de formation, "dans le même état que ce qu'est devenue la Russie ces dernières années".
"D'année en année, le bazar et la corruption deviennent de plus en plus prégnants", explique Pavel Filatiev. "La corruption, le désordre, le je-m'en-foutisme ont dépassé les limites de l'acceptable", ajoute-t-il, racontant avoir très vite déchanté après avoir signé son contrat.
Un témoignage qui en dit long sur l'état de l'armée russe et qui peut expliquer les revers subis par cette armée...
Sources :
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