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27 mars 2023 1 27 /03 /mars /2023 08:23
Le précariat : une nouvelle classe sociale...

 

"En Europe, un tiers des actifs qui travaillent se trouvent en situation de précarité professionnelle. Malgré un emploi, et parfois même plusieurs, les fins de mois se font difficiles et se loger, s'alimenter, se chauffer deviennent des questions délicates. Ces travailleurs forment une nouvelle classe sociale baptisée "précariat" par les économistes, un néologisme né de la contraction de "précarité" et de "prolétariat". La hausse des prix de l'alimentation et de l'énergie a considérablement augmenté l'insécurité économique de larges pans de la société, qui appartenaient jusqu'à présent à la classe moyenne. Alors que le tiers supérieur s'est enrichi malgré la crise, le décrochage de la partie basse s'est accentué. Occupant les emplois les plus précaires, les femmes apparaissent nettement plus touchées que les hommes.

 

En France, en Allemagne, mais également en Suède, autrefois considérée comme un paradis social, le précariat est en hausse. Certains participent à des actions de protestation, d’autres ne croient plus en l’État – ni en la démocratie – et comptent sur les systèmes de solidarité plus que sur les aides publiques. Tous partagent les mêmes angoisses et la même perplexité face à leur situation.

 

Une vague de contestation déferle sur l'Europe : les populations sont en colère contre la hausse des prix de l'alimentation et de l'énergie.

La contestation est attisée par une insécurité économique qui n'a cessé de croître au cours des dernières décennies. Elle touche de larges pans de la société qui appartenaient jusqu'à présent à la classe moyenne.

De plus en plus de contrats de travail sont à durée déterminée, les revenus sont fluctuants, souvent, un seul travail ne suffit plus. Les conditions de vie se précarisent.

 

"Si on ne s'attaque pas d'urgence aux insécurités qui touchent le précariat et à ses aspirations, nous assisterons à l'émergence d'un monstre politique.", déclare un économiste.

Ces dernières années, les Européens ont été confrontés à de nombreuses difficultés : une pandémie qui a entraîné de graves problèmes de santé et de longues périodes de confinement et deux guerres en Syrie et en Ukraine qui ont entraîné l'afflux de millions de réfugiés.

 

"Les inégalités se sont creusées, elles sont aussi devenues plus visibles socialement, aujourd'hui nous sommes face à un nouveau défi avec l'augmentation des prix du gaz et des produits alimentaires et cela va essentiellement toucher les classes moyennes inférieures."

Alors que le tiers supérieur de la société s'est enrichi malgré la crise, le décrochage du bas de la classe moyenne est de plus en plus marqué.

 

"On nous laisse tomber, comment un pays aussi riche que le nôtre peut-il compter autant de retraités pauvres ? C'est affreux", commente une Allemande.

Plusieurs personnes ont du mal à joindre les deux bouts alors qu'elles ont un emploi...

Parmi elles, en France, Patricia Lesage rencontrée par les journalistes une première fois, il y a 3 ans : à cette époque, elle partait travailler à 4 heures du matin pour faire le ménage dans une crèche avant l'arrivée des enfants. Elle est alors âgée de 56 ans et elle est payée 9,90 euros de l'heure sans complément de revenus.

A la fin du mois, elle touche environ 1100 euros quand tout va bien.

Mais cet emploi n'est que temporaire : il lui a été proposé par une agence d'intérim.

Ce n'est pas le seul travail de Patricia mais c'est celui qui lui rapporte le plus.

Patricia évoque la précarité de son travail, sa mauvaise rémunération, elle se sent rejetée par la société.

"9 euros, c'est la misère...", dit-elle.

 

La France a libéralisé son marché du travail relativement tard. En 2017, les règles du licenciement et du droit du travail temporaire ont été considérablement assouplies, avec ce qu'on appelle les ordonnances Macron, dans le but de créer de nouveaux emplois. Mais cela n'a pas marché. Les créations d'emplois n'ont pas été à la hauteur des espérances.

Dans les départements du Nord où vit Patricia et où le taux de chômage est le plus élevé de France, les revenus sont inférieurs à la moyenne et depuis longtemps.

Patricia a occupé toutes sortes d'emplois : elle a travaillé à la chaîne et dans l'industrie florale, actuellement, elle fait essentiellement des ménages et du repassage.

Quand elle sera à la retraite, elle touchera 270 euros, une misère !

"Cela veut dire qu'à 62 ans, je prends ma valise et je vais sous les ponts", dit-elle.

 

En France, le recours au travail temporaire, qu'il soit subi ou choisi, s'est massivement répandu ces dernières années.

L'Allemagne a développé le marché de l'intérim il y a déjà une dizaine d'années. Mais entre temps, la France est allée plus loin : la part du travail temporaire dans l'emploi global est aujourd'hui plus élevée qu'en Allemagne.

 

Selon un économiste, au cours des dernières décennies, le néolibéralisme a conduit à une redistribution du bas vers le haut au niveau mondial.

"On a vu émerger un capitalisme de rentiers dans lequel la richesse produite par les actifs qu'ils soient financiers, physiques ou intellectuels ne cesse d'augmenter, tandis que la part du revenu du travail dans le revenu national ne fait que diminuer. Cela fait 30 ans qu'on assiste à la stagnation du salaire réel.

En Europe et en Amérique du Nord, la libéralisation du droit du travail commence dans les années 80, l'emploi se précarise, les protections contre le licenciement sont assouplies et le recours aux intérimaires se développe. Les contrats à durée déterminée deviennent la norme.

Partout en Europe, l'ensemble de la classe moyenne inférieure voit son niveau de vie baisser.

Trois ans plus tard, la situation de Patricia Lesage s'est légèrement améliorée : elle a trouvé un nouvel emploi en tant que femme de ménage et aide cuisinière dans un centre pour handicapés. C'est le premier emploi fixe de sa vie mais ses revenus sont aussi faibles qu'avant... elle gagne environ 1400 euros par mois. L'inflation l'inquiète : les produits alimentaires sont constamment de plus en plus chers.

"L'électricité, l'eau, le gaz augmentent. Il faut faire attention à tout."

Patricia Lesage ne vote plus...

 

L'insécurité frappe de plus en plus de personnes obligées d'enchaîner les emplois tout en comptant chaque centime en fin de mois.

"Le précariat ne cesse de se développer dans tous les pays industrialisés... " déclare Guy Standing, économiste.

"Des millions de personnes à qui l'on dit qu'elles doivent s'habituer à une vie faite d'emplois précaires... plus grave encore que les emplois temporaires et les autres petits boulots, il y a le fait que ces personnes n'ont plus d'identité professionnelle : cela contribue à créer ce que l'on appelle l'insécurité existentielle."

 

En Allemagne, la précarité sévit aussi...

"Au départ, l'emploi précaire était supposé avoir une fonction de passerelle, pour le salarié, il y avait l'espoir de passer d'un emploi précaire à un emploi stable, mais cela ne se produit pas, c'est comme le hamster dans sa roue, et avec un emploi précaire, les gens se retrouvent très vite dans une situation de vie précaire..." dit Mona Motakef, sociologue.

"L'expression "le travail paie toujours" nie les inégalités car les conditions de départ dans la vie sont différentes en fonction de la famille dans laquelle nous sommes nés, en fonction de l'éducation et de la sécurité matérielle et l'origine migratoire joue également un rôle. Les gens réussissent aussi grâce à leurs privilèges de départ."

 

Les loyers augmentent en Allemagne, la misère grandit depuis plusieurs décennies.

La différence entre les riches et les pauvres ne cesse de s'accroître.

Et la pauvreté reste souvent cachée."

 

Source :

https://www.arte.tv/fr/videos/110347-000-A/pauvres-malgre-le-job/

 

 

 

 

Le précariat : une nouvelle classe sociale...
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commentaires

A
Histoire de rêver un peu. Voici les chiffres du chômage aux Etats-Unis: 3,5%...chez moi en Espagne on est à 13%....<br /> https://www.latribune.fr/economie/international/etats-unis-le-chomage-au-plus-bas-depuis-cinquante-ans-947072.html<br /> <br /> L'Europe a complètement "décroché"....
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R
13% de chômeurs en Espagne, c'est beaucoup. En France, c'est environ 7%, si les chiffres sont exacts.<br /> <br /> Merci pour le lien.
A
Une situation très alarmante, d'autant plus inquiétante que la première puissance européenne a montré le mauvais exemple. L'Allemagne et ses minijobs, l'Allemagne avec un quart de son 3 ème âge qui ne peut pas partir en retraite ou qui perçoit des retraites de misère...<br /> Nous payons très cher la mondialisation, les délocalisations, le manque de vision à long terme des présidents qui ont précédé l'actuel. C'est une catastrophe sociale qui a commencé il y a plus de 2 décennies et dont on mesure mal l'ensemble des implications.<br /> Guy Standing veut rester optimiste car dans la vidéo il parle d'un futur réveil face aux dangers des populismes...J'aimerais avoir son optimisme mais je vois mal ce qui à l'avenir va inverser la tendance.<br /> Rappelons que les intelligences artificielles vont encore plus nous compliquer la tâche car elles ne se substituent pas seulement aux professions répétitives et mécaniques. Dans le secteur bancaire, par exemple, ou en ingénierie, un pourcentage de plus en plus important des tâches sont réalisables par les AI.<br /> Bonne journée à tous
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R
Une situation inquiétante en Europe : l'Allemagne n'est pas épargnée, la misère est cachée, c'est ce qu'on apprend dans le reportage d'Arte, et on en parle peu. Guy Standing est optimiste mais on est loin de voir des dirigeants politiques se réveiller pour régler les problèmes, bien au contraire. La vidéo date de 6 ans...<br /> <br /> Belle soirée, AJE
P
Si on se fie aux IA on est effectivement assez mal barré !
L
Et ce matin j'apprends qu'il y a une méga grève des transports en Allemagne.<br /> <br /> Quant à l'intérim, j'ai débuté en 1993 et jusqu'à il y a une dizaine d'années... Tu dis qu'en Allemagne l'interim est développé depuis seulement 10 ans.<br /> <br /> Bonne semaine.
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R
Les Français ne sont pas les seuls à faire grève : les Allemands demandent une hausse des salaires pour faire face à l'inflation... L'intérim existe depuis un certain temps, mais il s'est développé ces dernières années : ce n'est pas moi qui le dis, mais c'est dit dans le reportage dont le lien figure sous l'article.<br /> <br /> Bonne semaine, LH