Monsieur le Ministre,
Je me permets de vous écrire pour manifester mon étonnement et ma surprise : en prenant vos fonctions, vous avez jugé bon d'accorder aux enseignants deux jours de congés supplémentaires lors des vacances de la Toussaint... Un cadeau qui paraissait tenir compte de la fatigue générée par le premier trimestre, le plus long de l'année...
On pourrait maintenant préciser : faux cadeau ou cadeau empoisonné !
En effet, il nous est demandé depuis le mois d'avril de récupérer ces deux journées en dispensant des cours le mercredi après midi : vous imaginez l'emploi du temps démentiel des élèves lorsqu'is doivent venir le mercredi après midi pour rattraper ces cours !
Les professeurs eux-mêmes ne sont pas épargnés...
Quels sont ces effets d'annonce ? S'il s'agit d'annoncer à grands renforts de déclarations qu'on donne des vacances aux enseignants pour les leur reprendre ensuite, les professeurs peuvent à juste titre se poser des questions et se demander si on ne les considère pas comme des girouettes ou des marionnettes : ce qu'on leur accorde généreusement d'une main, on le reprend subrepticement d'une autre....
Les élèves ont des emplois du temps chargés : leur demander de venir à 4 reprises le mercredi après midi pour rattraper deux jours de congés de la Toussaint est une aberration totale !
Ma candeur s'étonne aussi de voir perdurer ce que l'on appelle "l'accompagnement personnalisé" en classe de seconde ... Comment pourrait-on dispenser un enseignement personnalisé à des classes de 36 élèves ? Il n'est pas étonnant que les élèves eux-mêmes s'interrogent sur le fonctionnement de ces cours : il serait judicieux de revenir à ce l'on appelait autrefois l'aide individualisée qui permettait de réunir une dizaine d'élèves en difficulté auxquels le professeur pouvait apporter un soutien véritable...
Les mots ont un sens et ils ont aussi un sens pour les élèves : parler d'accompagnement personnalisé pour des groupes de 36 élèves ne peut tromper personne : il serait temps, dans un métier comme l'enseignement qui s'attache à utiliser le mot juste, de ne pas détourner précisément le sens des mots.
Ces faux semblants ne peuvent abuser qui que ce soit, si ce n'est des gens non avertis ; le public doit penser que les professeurs bénéficient de deux journées de congé en plus, mais c'est faux.
En entendant la dénomination accompagnement personnalisé, certains pourraient croire au miracle !
Assez de faux-semblants ! Assez de tromperies !
Si l'on veut restaurer l'éducation, il n'est pas sain de détourner le sens des mots : des jours de vacances sont bien des jours où on ne travaille pas et on ne peut, dans ce cas exiger une quelconque récupération, un enseignement personnalisé ne peut s'effectuer face à des classes surchargées...
Les mots ont un sens : il n'est pas bon d'en abuser pour créer des illusions, le monde de l'éducation ne peut se contenter, dans la situation difficile qu'il connaît, de faux-semblants...
L'éducation traverse une crise sans précédent : pour rétablir la confiance, il faut surtout éviter de masquer les réalités et prendre conscience des vrais problèmes, des vraies difficultés rencontrées par les élèves et les enseignants.
L'éducation mérite mieux que des faux-semblants et des décisions ne tenant pas compte de l'intérêt des élèves... L'éducation doit retrouver une place primordiale et essentielle dans notre pays : des mesures importantes doivent être prises pour restaurer l'autorité des enseignants qui méritent respect, considération...
Les professeurs attendent des solutions aux problèmes qui se posent : il convient de les aider à accomplir leur mission dans la clarté, la confiance, la sincérité...
Je vous prie donc d'agréer, Monsieur le Ministre l'expression de mon profond respect ainsi que mes salutations quelque peu étonnées et inquiètes...