L'ensemble MYRTHO fait revivre des chants populaires narratifs, de tradition orale, tirés le plus souvent des Chansons de geste ou d'épopées antiques. Dans le répertoire de MYRTHO, un lien est tissé entre Orient et Occident, avec des chants de traditions grecque, séfarade, corse, française et espagnole.
L’épos homérique désignait le "dire", la parole ; c'est la parole poétique, celle des aèdes ... l'aède, c'est le troubadour de l'antiquité..., cette parole se chantait et se psalmodiait, en vers ; chant long et continu, l’épopée divertissait banquets et festins par la voix de l’aède qui déployait mythes et hauts faits légendaires.
Voici donc un concert très original, qui nous fait entendre différentes langues, aux sons d'instruments comme le santour, la derbouka, le riq, le violon, l'alto, le kemençe...
Le santour est un instrument de musique iranien, diffusé dans tout le Moyen-Orient, appartenant à la famille des cithares sur table...
La derbouka est un instrument de percussion : c'est un vase étranglé en son milieu et recouvert à l'une de ses extrémités d'une membrane, répandu dans toute l'Afrique du Nord, l'Afrique Subsaharienne, le Moyen-Orient et les Balkans.
Le riq est un tambourin de 20 cm de diamètre, en peau de requin, au cadre serti de nacre et muni d'un double rang de cymbales.
Le kemençe classique est un petit instrument à trois cordes. Sa longueur est de 40-41 cm et largeur est de 14-15 cm.
Le concert s'ouvre avec un morceau intitulé La Porcheronne, un chant traditionnel français, d'inspiration médiévale sur le thème de Cendrillon. Probablement datée du XVIème siècle, cette chanson ferait référence à Guillaume II de Beauvoir, seigneur du Dauphiné, parti en guerre avec le roi Saint-Louis, le lendemain de ses noces en 1226.
On est comme envoûté par la voix enchanteresse de Laetitia Marcangeli qui interprète ce chant :
"C'est Guilhèm de Beauvoir
qui se va marier;
Prend femme tant jeunette,
ne sait pas s'habiller.
Le lendemain des noces,
le Roi l'a appelé,
Pour aller à la guerre
servir sa majesté :
« A qui donner ma mie,
ma mignonne à garder ?
— Va, va, mon fils Beauvoir,
je te la garderai. »
A sa dame mère
l'a bien recommandée :
« Tous les jours à la messe
vous la ferez aller.
Quand sera revenue,
la ferez déjeuner;
Avec les autres dames
la ferez promener.
Ne lui faites rien faire,
ni laver, ni pâter;
Que filer sa quenouille
quand elle voudra filer. »
Quand Guilhèm de Beauvoir
eut les talons tourné,
Dut s'habiller de serge
et les pourceaux garder.
A gardé sept années
sans rire ni chanter;
Au bout de la septième
elle s'est mise à chanter.
Beauvoir est delà l'ève, (l'eau)
l'a entendue chanter :
« Arrête, arrête, page,
entends-tu bien chanter ?
Semble que c'est ma mie,
la faut trouver. »
A traversé montagnes,
la mer a trépassé.
Quand fut dans le bocage,
la porchère a trouvé :
« Bonjour, la porcheronne,
pour qui dois-tu garder ?
— Pour monsieur de Beauvoir,
qu'est par delà la mer :
Y a sept ans qu'est en guerre,
s'en entend plus parler."
Puis, on écoute un extrait de l'Iliade, chant 19, raconté par Laetitia Marcangeli, la scène d'armement des Myrmidons :
"De même que les neiges épaisses volent dans l'air, refroidies par le souffle impétueux de Borée, de même, hors des nefs, se répandaient les casques solides et resplendissants, et les boucliers bombés, et les cuirasses solidement assemblées, et les lances de frêne. Leur éclat montait jusqu'au ciel, et toute la terre, alentour, riait sous l'éclair du bronze, et sous les pieds des hommes, un grondement s'élevait. Et, au milieu d'eux, s'armait le divin Achille...."
Cet extrait est alors suivi de plusieurs musiques guerrières...
On découvre ensuite avec émerveillement un chant traditionnel de Franche-Comté : Les trois princesses :
"Derrièr' chez mon père
Vole, mon cœur, vole !
Derrièr' chez mon père
Y a t'un pommier doux. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Y a t'un pommier doux.
Trois jeunes princesses
Vole, mon cœur, vole !
Trois jeunes princesses
Sont couchées dessous. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Sont couchées dessous.
Ce dit la plus jeune :
Vole, mon cœur, vole !
Ce dit la plus jeune :
— Je crois qu'il est jour. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Je crois qu'il est jour.
Ce dit la seconde
Vole, mon cœur, vole !
Ce dit la seconde
— J'entends le tambour. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
J'entends le tambour.
Ce dit la troisième :
Vole, mon cœur, vole !
Ce dit la troisième :
— Les gens de chez nous. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Les gens de chez nous…
S'en vont à la guerre
Vole, mon cœur, vole !
S'en vont à la guerre
Combattre pour nous. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Combattre pour nous.
S'il gagne bataille
Vole, mon cœur, vole !
S'il gagne bataille
Aura mes amours. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Aura mes amours.
Qu'il perde ou qu'il gagne
Vole, mon cœur, vole !
Qu'il perde ou qu'il gagne
Les aura toujours. (bis)
Larila don da,
Tout doux.
Les aura toujours."
Puis, c'est encore un étonnant chant traditionnel séfarade : El Rey de Francia :
"El Rey de Francia tres hijas tenía
La una lavrava y la otra cuzía
La mas chica de ellas bastidor hazía
Lavrando, lavrando sueno le callo
Su madre que la via aharvar la quería
No m’aharvex mi madre ni m’aharvariax
Un sueno me sonaba bien y alegría
Sueno vos soñavax yo vo lo soltaría
M’apari a la puerta vide la luna entera
M’apari a la ventana vide la estrella Diana
M’apari al pozo vide un pilar de oro
Con tres paxaricos picando el oro
La luna entera es la tu suegra
La estrella Diana es la tu cuñada
Los tres paxaricos son tus cuñadicos
Y el pilar de oro el hijo del rey tu novio
Le Roi de France avait trois filles
L’une lavait, l’autre cousait.
La plus jeune des trois brodait.
Tout en travaillant, elle s’endort et rêve.
Sa mère la voit et veut la battre.
Ne me bats pas, ma mère, ne me bats pas
J’ai fait un rêve plein de joie
Laisse-moi te le raconter
Je me suis arrêtée à la porte, j’y ai vu la pleine lune,
Je me suis arrêtée à la fenêtre, j’y ai vu l’étoile de Diana,
Je me suis arrêtée au puits et j’y ai vu une colonne d’or,
Avec trois petits oiseaux qui picoraient.
La pleine lune est ta belle-mère,
L’étoile de Diana est ta belle-sœur,
Les trois petits oiseaux, tes beaux-frères
Et la colonne d'or, le fils du roi, ton futur mari."
Place à la littérature latine avec un extrait des Héroïdes d'Ovide : Héro et Léandre sont un couple d'amoureux de la mythologie grecque. Le poète latin Ovide a imaginé dans les Héroïdes une lettre écrite par Léandre à Héro, et sa réponse.
Héro est une prêtresse d'Aphrodite à Sestos (sur la rive européenne de l'Hellespont), tandis que Léandre habite à Abydos, sur la rive asiatique. Toutes les nuits, Léandre traverse le détroit à la nage guidé par une lampe qu'Héro allume en haut de la tour où elle vit. Mais lors d'un orage, la lampe s'éteint et Léandre s'égare dans les ténèbres. Lorsque la mer rejette son corps le lendemain, Héro se suicide en se jetant du haut de sa tour.
"rupe sedens aliqua specto tua litora tristis
et, quo non possum corpore, mente feror.
lumina quin etiam summa vigilantia turre
aut videt aut acies nostra videre putat."
"Assis sur un rocher, je regarde tristement le rivage où tu es ; et, où je ne peux aller avec le corps, je m'élance en esprit ; mes yeux, fixés vers ce point, aperçoivent ou croient apercevoir les fanaux qui veillent sur le sommet de la tour.
Trois fois je déposai mon vêtement sur la plage aride ; trois fois je tentai de faire, nu, ce périlleux trajet ; la mer opposa son courroux à ma téméraire jeunesse, et lança contre mon visage, pendant que je nageais, des flots qui l’inondèrent...
Là est le port qu’il faut à mon navire ; nulle anse ne convient mieux à ma poupe. Que Borée m’y emprisonne, il me sera doux d’y séjourner."
On écoute aussi un chant traditionnel séfarade sur ce même thème antique de Héro et Léandre...
Le spectacle s'achève avec un extrait de la Bravura di Rodrigo, une romance issue du fameux cycle du Cid Rodrigo Lainez, chevalier mercenaire chrétien, héros de la Reconquista qui devint prince de Valence. Le personnage historique a ensuite laissé place à la légende du Cid, héros chevaleresque amant de Chimène...
Une musique prenante qui commence au son des percussions dans une atmosphère guerrière... Saisissant !
Merci et bravo à l'ensemble MYRTHO pour ce magnifique voyage dans l'espace et le temps !
Chant : Laetitia Marcangeli, santour et arrangements : Pierre Blanchut, percussions orientales : Timothée Tchang Tien Ling, violon, alto, kemençe : Raphaël Sibertin-Blanc.
https://www.chants-populaires-francais.com/textes_35/La_Porcheronne.html
https://lyricstranslate.com/it/bravura-de-rodrigo.html
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