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6 août 2016 6 06 /08 /août /2016 09:52
Pour célébrer la nuit des étoiles !

 



"Enfin, lorsque la nuit a déployé ses voiles, 

La lune, au visage changeant, 

Paraît sur un trône d'argent, 

Et tient cercle avec les étoiles, 

Le ciel est toujours clair tant que dure son cours, 

Et nous avons des nuits plus belles que vos jours."

Tels sont les vers que Jean Racine adressait à Monsieur Vitard, son oncle, pour évoquer les nuits qui magnifient le ciel, au dessus de la ville d'Uzès dans le Gard, où il séjourna pendant quelques mois... 


Les étoiles, la lune sont personnifiées dans un somptueux tableau, et parviennent à illuminer le ciel, d'une manière étonnante.



Le mot "étoile" nous est si familier ! Il a, pourtant, des origines anciennes et prestigieuses : issu du latin "stella", ce nom est apparenté au grec ancien "aster", et à l'anglais "star", un terme fréquemment utilisé, de nos jours, pour désigner un ou une artiste de talent...

Ce mot nous transporte dans un monde céleste, empreint de mystères...

Les mots "stellaire, constellation, astérie, astérisque" appartiennent à la même famille.

 L'astérie est le nom savant de l'étoile de mer... l'astérisque, une petite étoile, un signe graphique qui permet de renvoyer le lecteur à une référence, à une annotation...

L'étoile est, ainsi, présente, partout : dans le ciel, la mer, et même sur le papier ! L'étoile est une image si brillante...

Astre de la nuit, l'étoile brille d'un éclat particulier, c'est un symbole de beauté, d'élégance, de charme.

L'étoile est associée à nombre d'images valorisantes : une nuit à la belle étoile, l'étoile du berger, une étoile est née...

On aime, les nuits d'été, observer un ciel lumineux d'étoiles, on aime leurs noms évocateurs : la Grande Ourse, la Petite Ourse, le grand Chariot, le Cygne, Altaïr, Aldébaran, Vénus...

Que de poésie dans ces dénominations, que d'images, que de mystères à découvrir ! Que d'exotisme !

Altaïr, l'aigle en vol, dans la constellation de l'Aigle, Aldébaran, dans la constellation du Taureau, les Perséides, des pluies d'étoiles...

Des mots remplis d'échos sonores qui nous font rêver...

Les étoiles représentent un monde mystérieux, lointain, une énigme.

Elles évoquent d'autres formes lumineuses : l'anis étoilé, certaines fleurs qui font songer à des étoiles : fleurs astrales, astéracées, hélianthes, gazanias...

On perçoit d'autres images : on pense à l'étoile des neiges, à ses grands yeux, à l'étoile du berger, à un symbole de fête, on songe aux étoiles filantes, associées à des voeux de bonheur.

L'étoile peut évoquer la rêverie, l'amour, la pureté, l'innocence.

Alcyone, Aldébaran, Antarès, Maia, Véga, Bételgeuse : comment ne pas être ébloui par les noms mêmes de ces étoiles ? 

Chacun de ces mots nous révéle un univers plein de poésie, de sonorités éclatantes...

Le spectacle de la nuit a longtemps fasciné les hommes : ils ont projeté leurs rêves sur le monde stellaire, ils ont inventé des mythes.

Aujourd'hui, les hommes perdent ce contact avec le ciel et la nature : dans nos villes inondées de lumières artificielles, le spectacle de la nuit nous échappe... 


La 26 ème édition de la nuit des étoiles nous invite à renouer avec ce monde céleste : c'est le moment d'observer les étoiles filantes de l'essaim des Perséides, c'est le moment d'oublier nos écrans de télévision et d'ordinateur, pour admirer la voûte céleste...

 


Le poème de Racine :

 

http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/jean_racine/a_monsieur_vitart.html


 


 

Pour célébrer la nuit des étoiles !
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3 août 2016 3 03 /08 /août /2016 12:03
Un conte fantastique à découvrir et à méditer : Le chevalier double...

 

 



Combattre ses propres démons, vaincre le mal que chacun peut avoir en soi, parvenir à faire triompher le bien, c'est, là, le thème de cette nouvelle fantastique, intitulée Le chevalier double, dont l'auteur est Théophile Gautier.


Nous sommes, tous, plus ou moins, soumis à une dualité, le bien, le mal, et nous avons tous eu la tentation du mal.

Dans ce conte de Théophile Gautier, une jeune châtelaine, prénommée Edwige, mariée au comte de Lodbrog, s'est laissé envoûter par un étranger "beau comme un ange", au sourire glaçant, un chanteur, accompagné d'un corbeau noir.

L'histoire se déroule dans un pays du Nord qui n'est pas nommé, comme le suggèrent les noms des personnages aux consonances scandinaves.

Venu se réfugier dans le château de la dame, par une nuit d'orages et de tempête, cet inconnu est double : un sourire d'ange et un regard terrifiant.

On retrouve au début de ce récit, de nombreux ingrédients du conte fantastique... le lieu : il s'agit d'un château, le moment : l'histoire se déroule la nuit. L'évocation de la tempête est particulièrement inquiétante : "Il faisait un terrible temps cette nuit-là : les tours tremblaient dans leur charpente, les girouettes piaulaient, le feu rampait dans la cheminée, et le vent frappait à la vitre comme un importun qui veut entrer."

Dans cette description, on perçoit, comme souvent, dans le registre fantastique, le procédé de personnification de certains éléments du décor, ce qui accroît le mystère et la peur.

Après le départ du mystérieux inconnu, la châtelaine donne naissance à un fils, prénommé Oluf... mais elle perçoit en lui, le "regard noir de l'étranger".

Un "mire", une sorte de médecin ou de mage est consulté : il déclare, aussitôt, que le petit "Oluf" a une étoile double, une verte, une rouge, une verte comme l'espérance, une rouge comme l'enfer..."

L'enfant grandit, tantôt "bon comme un ange", tantôt "méchant comme un diable".

Choisira-t-il le bien ou le mal ?

Quel sera son destin ? Qu'est-ce qui pourra le sauver du mal ?

Il devra combattre, de toutes ses forces, le mal qui est en lui, dans une lutte héroïque et féroce, il devra vaincre ses mauvais démons.

Ce combat est mis en scène, quand Oluf rencontre son double maléfique : un choc violent entre deux chevaliers, un choc dont l'issue semble incertaine...

Ainsi, chacun d'entre nous doit lutter contre des pulsions de haine, de jalousie, de rancoeur, chacun d'entre nous a une part d'ombre.

Ce récit fantastique a valeur de message : il nous montre toutes les difficultés de vaincre les forces du mal : le mensonge, l'hypocrisie, la méchanceté, le désir de soumettre, la violence.

Ne sommes-nous pas tous doubles ?

Il nous faut souvent affronter ces forces du mal, les vaincre, essayer de dépasser le désir de vengeance, la haine.

C'est ce qui fonde l'humanité : cette lutte passe par la réflexion, par l'effort, par des conflits internes qu'il nous faut résoudre et comment les résoudre ?

Comment affronter ses propres démons ?


Ce récit bref, fascinant, facile à lire, écrit dans un style original et vivant, nous entraîne dans un univers fantastique, tout en nous incitant à la réflexion : une lecture de vacances accessible à tous !






Le texte :

 

https://fr.wikisource.org/wiki/Romans_et_Contes_de_Th%C3%A9ophile_Gautier/Le_Chevalier_double

 

Un conte fantastique à découvrir et à méditer : Le chevalier double...
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29 juillet 2016 5 29 /07 /juillet /2016 09:33
Une fille qui sort d'un bain au flot clair...

 

Pour le plaisir et la poésie des mots : le bain !


 

"Reste ici caché : demeure !
Dans une heure,
D'un oeil ardent tu verras
Sortir du bain l'ingénue,
Toute nue,
Croisant ses mains sur ses bras.


Car c'est un astre qui brille
Qu'une fille
Qui sort d'un bain au flot clair,
Cherche s'il ne vient personne,
Et frissonne,
Toute mouillée au grand air."

 

C'est ainsi que Victor Hugo évoque, avec sensualité, Sara la baigneuse, dans un poème extrait des Orientales... La jeune femme, sortie du bain, ne peut que susciter l'attention des spectateurs...



Le mot "bain", issu d'un terme, latin 'balneum", est ancien : on ne s'en étonnera pas, car les romains pratiquaient l'art du bain, ils fréquentaient régulièrement les thermes, lieux de rencontres et de bien-être...


Les premières installations de bains datent de 2 500 ans av. J.-C. Les thermes sont, d'abord, privés et les thermes publics n'apparaissent qu'au premier siècle avant JC... Ces établissements avaient plusieurs fonctions : on s’y lavait, mais on y côtoyait, aussi, des amis, on y faisait du sport, on jouait aux dés, on se cultivait dans des bibliothèques, on pouvait y traiter de toutes sortes d' affaires ou se restaurer.


De nos jours, le bain, c'est souvent un moment de détente, dans une baignoire ou encore en été, une immersion dans la mer qui procure bonheurs et sérénité....


Ce mot d'une seule syllabe nous fait entrevoir une plongée soudaine dans l'eau : le nom vient, probablement, d'un verbe grec plus ancien, "bapto", qui signifie plonger....


On perçoit aussitôt la relation de sens avec le mot "baptême".


Le bain, c'est le contact avec la magie de l'eau, c'est le plaisir de se fondre dans cet élément qui nous apaise et nous apporte un réconfort unique...

Dans une baignoire, on goûte au bonheur du savon, de sa douceur, de ses parfums.

En mer, on se laisse porter par les vagues, les replis de l'eau, on se gorge de senteurs marines, d'embruns, on goûte aux éclats ensoleillés des flots...

Le mot lui-même, avec sa labiale initiale, sa voyelle nasalisée, nous laisse imaginer toute la fluidité de l'eau, ses élans, ses envolées, ses vagues...

Ce mot lumineux et dansant nous fait voir des rives ensoleillées, des calanques de pierres blanches qui dévalent les collines, une mer bleutée, aux embruns de blancs, des paysages d'été énivrés de candeurs.

On goûte, au petit matin, le plaisir de se baigner dans une crique, près de l'ombre des pins du midi, on se dore au soleil levant, on écoute les échos répétés des vagues, on se rafraîchit de bonheurs.

On s'exalte, aussi, des senteurs de pins mêlées à celles des ondes amères...

On se glisse dans l'onde salée, on se laisse porter par les flots, on entre dans un autre univers, léger, aérien, subtil...

On se fond dans l'élément marin, on s'enivre de couleurs, de lumières, d'éclats de vagues, on entend des bruissements d'eau, des clapotis.

On peut prendre, ensuite, un bain de soleil et de lumières...

Mais le bain est, dès les origines, lié à l'eau, car le verbe grec "bapto" signifie "plonger dans l'eau"...

L'eau, cet élément symbole de vie, nous apporte tant de bienfaits, tant de sensations diverses : couleurs, senteurs, fraîcheur ou chaleur, murmures apaisants...

L'eau n'est-elle pas associée à la sensualité, au bonheur des sens ?

Voilà un mot qui remonte à un terme grec très ancien, un mot qui nous permet de relier le présent et le passé, un mot riche d'histoires et de résonances !

 

 

 

Le poème de Victor Hugo :

 

http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/victor_hugo/sara_la_baigneuse.html

 

 

 

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25 juillet 2016 1 25 /07 /juillet /2016 15:16
Le culte de l'utilitarisme...

 

 

 

 

Utile ! Désormais, il faut que tout soit utile ! On en oublie l'essentiel : le rôle de la culture dans la formation de l'individu...

Dans notre monde moderne, les humanités n'ont plus leur place, l'enseignement du latin et du grec est, ainsi, sacrifié, avec la nouvelle réforme des collèges, prévue pour la prochaine rentrée scolaire.

 

Bientôt, les cours de Français pourraient se réduire à l'apprentissage de la langue : fini l'enseignement de la littérature, finies la lecture et l'explication des grands textes de notre patrimoine.

A quoi bon étudier Racine, Corneille, Molière, Rabelais, La Fontaine ?

 

Il faut privilégier ce qui est directement utile dans la formation des individus : on s'oriente vers une éducation pratique et technique.

On en oublie la sensibilité, l'importance de la culture littéraire et humaniste...  grave lacune dans un monde où l'individualisme est grandissant...

 

Je me souviens d'une remarque d'un de mes élèves : "A quoi sert le cours de Français ? Je sais parler Français...", comme si la seule maîtrise de la langue suffisait à la formation d'une personnalité.

Que fait-on de l'intelligence, de la compréhension du monde et des autres ?

La littérature offre justement cette ouverture aux autres qui manque cruellement dans nos sociétés...

 

La plupart des médecins deviennent des techniciens sans âme : or, la relation avec les patients est essentielle, une confiance doit s'établir et doit passer par un dialogue humaniste.

Les administratifs n'ont plus le sens de la relation humaine : ils traitent, parfois, les gens comme des objets, des numéros.

La communication devient de plus en plus inhumaine, elle passe par des téléphones, des ordinateurs et la vraie communication se délite.

Les hommes politiques, au cours de campagnes électorales tapageuses, font, aussi, de fausses promesses, n'hésitent pas à leurrer les gens pour s'emparer du pouvoir : leur visée est utilitaire.

 

Les êtres humains attachés à des biens matériels, à leurs voitures, leurs portables perdent le contact avec les autres.

Il faut, donc, plus que jamais, former les individus à la culture : si celle-ci semble ne pas avoir une utilité immédiate, elle est pourtant essentielle pour assurer la cohésion d'une société, elle apporte à chacun un épanouissement personnel, une curiosité, une acuité d'esprit.

Elle offre une liberté, une façon d'appréhender le monde et les autres, avec humanité.

Notre monde de technicité grandissante ne doit pas renoncer à la culture qui est essentielle.

 

Vers quel abîme d'égoïsme se dirige-t-on, si on renonce à la culture ? Vers quel gouffre d'inhumanité allons-nous être précipités ?

Un monde purement utilitaire ne peut pas être un monde heureux. Nous avons tous besoin d'une formation à la sensibilité.

La réflexion est, aussi, essentielle : les grands textes nous offrent l'occasion de réfléchir à toutes sortes de sujets qui nous concernent tous.

Ne perdons pas notre humanité dans un monde d'objets, ne perdons pas ce qui fait l'essence même de l'être humain : redonnons à la culture toute sa place, pour un avenir meilleur.

 

 

 

 

 

Le culte de l'utilitarisme...
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20 juillet 2016 3 20 /07 /juillet /2016 12:04
Les grands lézards chauds des feux du midi...

 

 

Pour le plaisir des mots : le lézard !


"Sous les noirs acajous, les lianes en fleur,
 Dans l'air lourd, immobile et saturé de mouches,
 Pendent, et, s'enroulant en bas parmi les souches,
 Bercent le perroquet splendide et querelleur,
 L'araignée au dos jaune et les singes farouches.
 C'est là que le tueur de boeufs et de chevaux,
 Le long des vieux troncs morts à l'écorce moussue,
 Sinistre et fatigué, revient à pas égaux.
 Il va, frottant ses reins musculeux qu'il bossue ;
 Et, du mufle béant par la soif alourdi,
 Un souffle rauque et bref, d'une brusque secousse,
 Trouble les grands lézards, chauds des feux de midi,
 Dont la fuite étincelle à travers l'herbe rousse.
 En un creux du bois sombre interdit au soleil
 Il s'affaisse, allongé sur quelque roche plate ;"
 


C'est ainsi que Leconte de Lisle évoque le jaguar, sa silhouette sombre et imposante qui fait fuir soudainement les lézards, dans un poème intitulé Rêve de jaguar...


Le lézard nous fait admirer ses formes sinueuses, au coeur de l'été : un corps fuselé et marqueté de marbrures et de motifs variés....

Le lézard surgit soudain d'une roche et nous surprend par sa rapidité ét sa vivacité car il est prompt à s'évanouir, aussi vite qu'il est apparu...

Beau reptile qu'on aimerait observer plus longuement, belle marqueterie de fins réseaux entrelacés...

Le mot aux sonorités de sifflante "z", de gutturale "r" semble montrer à la fois beauté et inquiétude, douceur et rudesse.

Le lézard évoque des animaux primitifs et lointains, des monstres originels qui fascinent et terrorisent.

Le lézard, un mur qui se lézarde, un mur en ruines qui s'écroule...

Le lézard suggère aussi cette menace, cette déchirure...

Le mot fait surgir les chaleurs lourdes de l'été, lorsqu'on aperçoit, au détour d'un chemin, sa longue silhouette, ses mouvements vifs, sa cambrure élégante.

Vision fugitive, éclats de lumières sous le soleil accablant de Provence, alors que les cigales répercutent leurs voix redoublées et intenses sur les paysages...

Vision éblouissante qui s'évanouit...

Ombre légère sur les pierres, le lézard fugitif laisse les empreintes de son image : des teintes de gris, de verts, des fuseaux subtils qui ondoient et disparaissent.

Il s'attarde, parfois, sur les murs embrasés des feux de l'été : il se laisse dorer par le soleil, devient bijou de lumières.

Le mot "lézard", venu du latin "lacertus" a des origines anciennes. Le poète Virgile utilise ce nom dans les Bucoliques : on voit, ainsi, dans un extrait de cet ouvrage, un lézard rechercher l'ombre des ronces pour échapper à la lourde chaleur qui enflamme les paysages....

Le lézard est associé au sud, à la Méditerranée, il aime les éboulis de pierres, les calanques.


Le lézard nous séduit par ses formes, ses couleurs, ses danses ondoyantes et légères, ses mosaïques surprenantes.





 

Les grands lézards chauds des feux du midi...
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14 juillet 2016 4 14 /07 /juillet /2016 08:35
Pour célébrer la fête du 14 Juillet : le verbe "pétarader" !

 



"Pétarader" ! Il suffit de prononcer ce verbe pour entendre des bruits tonitruants et répétés...

Les moteurs d'autrefois pétaradaient souvent au démarrage et c'était un festival de sonorités éclatantes... On entend, encore, parfois, certains de ces engins bruyants, des grosses motos qui produisent des sons démesurés.


Les feux d'artifices, aussi, pétaradent vivement dans des envolées de poudre étincelantes et rayonnantes...

On voit des girandoles, des explosions colorées qui traversent le ciel, on perçoit des fontaines de lumières dans l'obscurité de la nuit.

On admire des éclats, des envolées d'éclairs, des tableaux éblouissants qui enflamment les ténèbres.

On est ébloui et subjugué par des flammèches qui semblent surgir du monde de la nuit...

Ce verbe aux sonorités évocatrices nous fait percevoir des crépitements soudains, avec sa labiale initiale, ses dentales "t" et d", sa gutturale "r", et sa voyelle réitérée "a".

Des échos semblent se répondre, se répandre, envahir l'espace, dans ce verbe plein d'expressivité...

Dérivé d'un verbe latin, "pedo", ce mot appartient à la même famille que les termes "pet, péter, pétard, pétoire, pétarade, pétoche, contrepèterie".

On perçoit toute la familiarité de ces mots qui évoquent des réalités du corps ordinaires ou encore des objets de fête, comme le "pétard", ou un outil usagé comme la "pétoire", qui est un vieux fusil...

On connaît aussi l'interjection "pétard !", qui marque la surprise, l'étonnement, une forme de stupéfaction soudaine... On utilise volontiers dans le sud, à Marseille, cette exclamation familière : "Pétard ! Que c'est beau !"


On ne peut manquer d'évoquer, en cette occasion, Rabelais, passé maître en l'art du pet et de la contrepèterie, on songe à la verve et à la truculence rabelaisienne, à des jeux de mots qui rebondissent, on songe au jeune Gargantua "barytonnant du cul".


 Tous ces mots remonteraient au grec "bdéo" "péter"... Aristophane utilise ce verbe dans certaines de ses comédies...

On voit ici toute la richesse de dérivation des mots, toute leur expressivité dans les sonorités !


Comment ne pas être sensible à la bonhomie de tous ces termes familiers, qui appartiennent au langage populaire, qui nous font entendre la voix du peuple ?


J'aime ces mots simples, ordinaires et si expressifs...

Ils nous font apprécier la langue française, sa diversité, ils nous font percevoir des sons, des images variées qui appartiennent au passé ou au présent, ils évoquent des souvenirs, une vieille guimbarde d'un grand-père paysan, qui ne pouvait démarrer qu'avec un tour de manivelle, un vieux fusil de chasseur usagé, des feux d'artifice éblouissants sur l'eau...

Des feux d'artifice, symboles de fêtes et de célébrations... des éclats lumineux qui rebondissent, retentissent et se répercutent dans l'ombre de la nuit...
 


 


 

Pour célébrer la fête du 14 Juillet : le verbe "pétarader" !
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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 12:23
Déesse charmante, hâte-toi...

 

 

 

 

Chateaubriand reproduit, dans un extrait de son oeuvre, Les Mémoires d'outre-tombe, des poèmes de sa soeur Lucile : l'un d'entre eux est consacré à l'Aurore, ce moment particulier d'une journée où le monde s'éveille et se dore de teintes nouvelles... sublime poème empreint de sensibilité et de beauté.

Voici le texte de ce poème en prose :

 

L’AURORE.
« Quelle douce clarté vient éclairer l’Orient ! Est-ce la jeune Aurore qui entr’ouvre au monde ses beaux yeux chargés des langueurs du sommeil ? Déesse charmante, hâte-toi ! quitte la couche nuptiale, prends la robe de pourpre ; qu’une ceinture moelleuse la retienne dans ses nœuds ; que nulle chaussure ne presse tes pieds délicats ; qu’aucun ornement ne profane tes belles mains faites pour entr’ouvrir les portes du jour. Mais tu te lèves déjà sur la colline ombreuse. Tes cheveux d’or tombent en boucles humides sur ton col de rose. De ta bouche s’exhale un souffle pur et parfumé. Tendre déité, toute la nature sourit à ta présence ; toi seule verses des larmes, et les fleurs naissent. »

 

 

Comme dans la mythologie grecque, l'Aurore est personnifiée, grâce à l'emploi de la majuscule, elle est, aussi, présentée comme une déesse, une entité vivante dont elle a tous les attributs : "des beaux yeux, une robe, une ceinture, des pieds délicats, de belles mains, des cheveux d'or, une bouche..."

 

La personnification se poursuit avec l'utilisation de la deuxième personne et de l'impératif : "hâte-toi, quitte, prends", on entrevoit comme une impatience de la part de celle qui parle, comme si elle s'adressait familièrement à une enfant : l'Aurore apparaît si proche, si présente, si jeune.

 

Le portrait est à la fois vague et particulièrement élogieux, comme le suggèrent de nombreux adjectifs valorisants : "beaux yeux, déesse charmante, pieds délicats, belles mains, souffle pur et parfumé." On perçoit une beauté idéalisée, mais si vivante et si naturelle : les artifices ne sont pas utiles pour embellir la jeune femme.

Dès la première phrase, l'exclamation souligne, aussi, l'éloge...

 

L'auteur décrit l'aurore comme une jeune femme surprise à son réveil, qui ouvre des yeux encore embrumés de sommeil.

Chargée d'ouvrir les portes du jour, la déesse apparaît très humaine dans toute cette évocation.

Des couleurs chaleureuses et douces lui sont associées : "la robe de pourpre, tes cheveux d'or, ton col de rose"...

Et, aussitôt, on voit apparaître, sous nos yeux, toutes les teintes d'un jour naissant. 

Une sensation à la fois olfactive et tactile vient s'ajouter à cette sensation visuelle : "un souffle pur et parfumé", si bien que cette description apparaît très sensuelle.

L'Aurore suscite, enfin, la joie dès qu'elle apparaît : elle éclaire le monde, la nature et les hommes, de ses couleurs tendres ou éclatantes.

Et l'on voit soudain, à la fin du poème, les larmes de l'aurore qui peuvent symboliser la rosée du matin, dernière touche mélancolique et poétique du texte.

Les sonorités de sifflante et de chuintante qui ponctuent le texte contribuent à la douceur de cette évocation : "douce clarté... est-ce la jeune aurore, ses beaux yeux chargés des langueurs du sommeil... déesse charmante... la couche nuptiale... une ceinture... nulle chaussure ne presse..."

 

Imprégné de culture antique, ce poème écrit par la soeur de Chateaubriand suscite le rêve : un personnage divin prend vie sous nos yeux, il s'anime, devient une présence humaine.

 

 

Voici le commentaire de Chateaubriand lui-même sur les poèmes de sa soeur, Lucile :

"Les pensées de Lucile n'étaient que des sentiments; elles sortaient avec difficulté de son âme ; mais, quand elle parvenait à les exprimer, il n'y avait rien au-dessus. 


Elle a laissé une trentaine de pages manuscrites ; il est impossible de les lire sans être profondément ému. 
L'élégance, la suavité, la rêverie, la sensibilité passionnée de ces pages offrent un mélange du génie grec et du génie germanique." 

 

Mémoires d'Outre-Tombe



La biographie de Lucile de Chateaubriand :

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Lucile_de_Chateaubriand

 

 

 

Photo : rosemar

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9 juillet 2016 6 09 /07 /juillet /2016 12:36
Regardez-les danser... dans les feux de l'aurore...

 

 

 

Quelle beauté et quelle cruauté dans ce poème de Théodore de Banville mis en musique par Georges Brassens ! Un poème sous forme de ballade, avec un refrain qui ponctue le texte....


Le cadre évoqué est une magnifique forêt, personnifiée dès le premier vers : on voit "ses larges bras étendus", belle image qui fait de la forêt un être humain. Le début du poème est empreint de douceur, et on assiste au réveil de la déesse "Flore" qui symbolise la nature, dans l'antiquité...


Mais cette forêt cache et recèle bien des horreurs : les branches ont servi de gibets et sont couvertes de pendus... Banville alterne, tout au long du texte, beauté, magnificence du décor et cruauté du sort réservé aux cadavres des pendus, ces sujets du "roi Louis", représentant d'un pouvoir absolu qui n'hésite pas à châtier des opposants, de pauvres gens sans doute....


La scène se passe le matin, à l'aurore, au lever du soleil, au moment où les doux rayons effleurent, caressent et dorent  la nature... tout est splendide et les pendus, eux-mêmes, deviennent "des chapelets, des grappes de fruits inouis" ! 


Quelle ironie dans ces images qui évoquent la religion et une nature luxuriante ! Plus loin, les pendus se mettent à "voltiger" dans l'air et à "danser dans les feux de l'aurore", vision d'horreur et de beauté, à la fois.

Le verbe "danser", associé à la mort, crée un effet de surprise et souligne l'horreur du tableau.

La nature est encore personnifiée, grâce à un impératif, puisque les cieux sont invités par le poète à "regarder" ce spectacle et cette chorégraphie macabre.


Toute la magnificence de l'aurore apparaît alors : "la rosée", l'azur qui commence à poindre, un "essaim d'oiseaux réjouis" qui gazouillent et "picorent gaiement" les têtes de ces malheureux pendus....


Le contraste entre la splendeur du décor et la vision des cadavres en suspension est saisissant... il permet, encore, de souligner la violence du châtiment, son injustice.


Les pendus, eux mêmes, qui "décorent" les arbres deviennent des images de beauté : le "soleil levant les dévore", et les cieux sont "éblouis" par leur sarabande !

Le décor semble s'illuminer  et se "tendre" de bleu, le soleil se métamorphose en "météore", comme pour souligner l'horreur du châtiment infligé aux suppliciés....


Les pendus semblent, d'ailleurs, devoir se multiplier puisqu'ils appellent d'autres pendus. On perçoit bien toute la cruauté du pouvoir royal, son pouvoir arbitraire puisque ce "verger" est celui du roi "Louis", idée reprise de manière insistante dans le refrain...


On ressent l'apitoiement du poète dans l'expression "ces pauvres gens morfondus"...


Les sonorités très douces du texte s'opposent à la vision atroce de ces suppliciés : la sifflante "s", la fricative"f", la chintante "ch" sont utilisées à maintes reprises et donnent une impression de douceur infinie....

 
"La forêt où s'éveille Flore, 
A des chapelets de pendus 
Que le matin caresse et dore. 
Ce bois sombre, où le chêne arbor
Des grappes de fruits inouïs..."

La gutturale "r", plus âpre, met en évidence la dureté du châtiment et sa violence.

Dans l'envoi final, on retrouve un contraste entre les misérables pendus confondus dans "un tas"et le décor qui est somptueux : "un tas de pendus enfouis Dans le doux feuillage sonore".
 
En associant ainsi la splendeur de la nature à l'horreur du châtiment, Banville dénonce d'autant mieux le sort réservé à ces sujets du roi : le lecteur ressent une émotion, une injustice révoltante.

 

La musique composée par Georges Brassens, très rythmée et lente restitue une ambiance moyenâgeuse et souligne la beauté du décor tout en insistant sur le message : une violence injuste et terrifiante.

 

Ce texte qui évoque le roi Louis comporte, aussi, une valeur intemporelle, puisqu'il dénonce l'horreur de tous les châtiments et de tous les pouvoirs arbitraires.

 

 

 

Le poème de Banville : 

 

http://www.crcrosnier.fr/mur4/prt4/banvillet4.htm

 

http://en.quetes.free.fr/archives/la-foret/articles/verger_banville.htm

 

 

 

 

https://www.youtube.com/watch?v=LhamMj_T4TY&feature=youtu.be
 

 
 


   
  Photo : rosemar

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6 juillet 2016 3 06 /07 /juillet /2016 11:55
Le navire roulait sous un ciel sans nuages...

 

 



Pour le plaisir des mots : le navire !

 

C'est le moment de voyager, de prendre la mer sur des navires élégants, fiers coursiers qui traversent les ondes...

 Baudelaire évoque, souvent, dans son oeuvre, des rêves de voyage et d'évasion : il imagine des traversées sur des mers houleuses, vers des pays lointains. Dans un de ses poèmes, Le voyage à Cythère, on retrouve cette thématique :


"Mon coeur, comme un oiseau, voltigeait tout joyeux 
 Et planait librement à l'entour des cordages ; 
 Le navire roulait sous un ciel sans nuages ; 
 Comme un ange enivré d'un soleil radieux."



Le mot "navire" nous emporte sur des mers, aux flots sans cesse mouvants et ondoyants, des étendues infinies de bleu où le ciel et la mer se rejoignent et se confondent...

Il nous fait chavirer, avec ses voyelles bien distinctes, le "a" bien ouvert, le "i" plus aigu, la fricative "v", pleine de douceur, la gutturale "r", plus âpre...

Le mot nous fait goûter des embruns virevoltants, des odeurs d'écumes et de liberté, des envolées de mouettes sur la crête des vagues, des senteurs d'algues marines.

Envie de voyages et de découvertes, aventures sur les ondes, mystères... le navire, c'est, d'abord, l'épopée d'Ulysse, histoire fondatrice qui nous emmène sur les rives de la Méditerranée.

Le mot est issu, d'ailleurs, d'un ancien terme grec : "
ναῦς, naus", "le navire". Homère utilise ce nom, maintes fois, dans l'Odyssée.

On y voit des navires emportés par des vents favorables sur le "vaste dos des mers", "ἐπ᾽ εὐρέα νῶτα θαλάσσης", belle image qui sert à diviniser et personnifier l'étendue marine.


Le mot nous fait voir des voiles chahutées, aux teintes éclatantes sur le bleu des vagues, des cahots, des lumières éblouissantes de reflets sur les ondes...

Des chaloupes fragiles emportées par les flots, des tempêtes, des apaisements, le flux et le reflux, les paroles ondoyantes de la mer, ses fureurs...

Le mot semble révéler élégance et fragilité, il était, ainsi, féminin aussi bien en latin qu'en grec, avec les formes "navis" et "naus".

Le terme ancien "la nef" avait gardé cette marque pleine de charme.

On perçoit une sorte de délicatesse, de finesse, dans ce nom, plus que dans le terme "bateau", issu, lui, de l'anglais "bat", "boat".


"Le navire, la nef, naviguer, navigation, nautique, nautisme, nautonier, navette, internaute", de nombreux mots sont dérivés du nom "navis".

De là vient, aussi, le nom du "Nautilus", le sous-marin de l'oeuvre de Jules Verne, Vingt mille lieues sous les mers.


On perçoit des mots variés dont certains sont anciens, d'autres évoquent des réalités pleines de modernité : l'internaute est celui qui "navigue" sur internet.

On voit que ce radical, issu du grec ancien, "naus" a connu une belle continuité, il a traversé les siècles, nous est parvenu presque intact, avec, parfois, des évolutions de sens intéressantes.

 

Voilà un mot venu du passé qui nous fait voyager vers des îles lointaines, des paysages éblouis de soleils, des images d'étendue marine aux reflets étonnants...

Voilà un terme "homérique", par excellence, qui nous fait remonter à l'épopée primitive : l'Odyssée, les sources mêmes de notre littérature...

 


 

 

 

 

 

 

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28 juin 2016 2 28 /06 /juin /2016 12:39
Pour le plaisir des mots : diaprer...

 

 

 


"Le pays offrait un aspect tout différent de celui de la Grèce : les cotonniers verts, les chaumes jaunissants des blés, l'écorce variée des pastèques diapraient agréablement la campagne..." C'est ainsi que Chateaubriand décrit la Turquie et les plaines de l'Asie, dans un extrait de son oeuvre, Itinéraire de Paris à Jérusalem....


Dans ce paysage, le verbe "diaprer" nous fait admirer une variété de couleurs, une infinité de nuances... 

Le terme ancien "diaspre" ou "drap de soie couvert de fleurs, d'arabesques, de ramages.ondoyants" est à l'origine de ce verbe étonnant.

Ce mot tisse des étoffes somptueuses, des motifs pleins d'harmonie et de douceurs, il nous fait entrevoir la lumière du soleil qui irise les jardins.

Apparenté au "jaspe", pierre aux teintes diverses, blanc, beige, rouge, vert, rosé, noir, le "diaspre" nous éblouit de ses reflets de soie...

Pierre précieuse, drap chatoyant s'unissent dans ce verbe aux sonorités variées : dentale, labiale, gutturale.

Les voyelles "i" et "a" s'entralacent, comme pour suggérer ces éclats nuancés du tissu.

Ce mot compose, ainsi, un véritable tableau aux glacis de lumières : la campagne se couvre de lueurs qui se mêlent...

Ce verbe nous fait toucher des parures soyeuses, des entrelacs de couleurs qui se fondent l'une dans l'autre...

Fusion, réunion de nuances diverses, on voit se dessiner un paysage, comme une peinture impressionniste d'un Cézanne ou d'un Manet...

Des éclats de couleurs jaillissent, surgissent sur la toile ! Un simple verbe suggère ces ardeurs, ces tons de jaune et de verts qui se nuancent.

Un simple verbe fait étinceler un paysage, le nimbe de lueurs de soie...

La soie brillante, légère, aérienne, subtile !

La campagne se transforme, devient comme une texture ondoyante, on perçoit une impression de douceur.

Il semble même qu'on pourrait toucher du doigt ce paysage turc aux cultures variées : coton, chaume, écorces de pastèques....

On devine des feuilles vernissées, des éclats de jaune, des écorces lisses.

Cette campagne nous séduit de ses reflets changeants : un tableau se dessine sous nos yeux, une toile pleine de luminosité et d'éclats....








 

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