Pourquoi des IA féminines ? Depuis toujours, même dans la pop culture ou dans le cinéma, énormément de représentations d'IA ont des traits féminins. En fait, les IA féminisées sont perçues comme plus humaines, plus chaleureuses, davantage dignes de confiance.
"Elles s'appellent Alexa, Cortana, Diella, ce sont parfois des actrices comme Tilly Norwood... Leur point commun ? Ces femmes ont toutes été générées par l'intelligence artificielle... Les IA se conjuguent très souvent au féminin, comme Diella, cette ministre virtuelle en charge des marchés publics en Albanie.
Une IA qui occupe un poste politique !? N'est-ce pas inquiétant ?
Cette féminisation a déjà suscité des critiques par le passé et une enseignante en marketing éthique relance le débat..
Dès 2019, l'UNESCO alertait sur "la soumission féminine de Siri et la servilité exprimée par tant d'autres assistants numériques ayant l'aspect d'une jeune femme, soit, selon l'institution, une illustration flagrante des préjugés sexistes véhiculés par les produits technologiques.
En 2021, Apple avait d'ailleurs fait marche arrière, laissant le choix pour sa version américaine entre une version masculine ou féminine.
Mais, pour Sylvie Borau, professeur de marketing éthique, la nomination il y a quelques jours d'une ministre virtuelle en Albanie a de quoi inquiéter...
"Cette humanisation et cette féminisation donnent l'illusion d'une humanité, et elle va, à travers cette illusion, rassurer, séduire... là, en l'occurrence, ils ont utilisé les traits d'une actrice albanaise connue. En faisant cela, ils vont rendre la machine plus acceptable, et en augmentant son adoption, on peut augmenter les risques de manipulation, parce que les femmes sont perçues en moyenne comme plus morales, plus empathiques, plus susceptibles de ressentir des émotions. Et ces qualités, en fait, font défaut aux machines, aux algorithmes.
Le deuxième problème, c'est l'objectification : la femme devient une machine... c'est totalement déshumanisant pour les femmes, et puis après, les stéréotypes bien sûr, à la pelle."
Sylvie Borau a alerté en ligne : sur le site de The Conversation, elle regrette au passage notre usage désormais acté du terme "intelligence" pour l'IA et elle préconise des représentations qui ne soient plus anthropomorphiques, au moment où l'on s'interroge toujours davantage sur les liens intimes que nous pouvons entretenir avec les IA et avec le dernier épisode en date d'une actrice entièrement virtuelle qui dit ressentir des émotions bien réelles..."
"Tilly Norwood, une nouvelle actrice a fait sensation au Festival de Zurich. Et pour cause, elle a entièrement été créée par une intelligence artificielle. Une irruption qui suscite des interrogations quant à l'avenir de la profession d'acteur.
Elle vient de faire une apparition très remarquée ce week-end au Zurich Film Festival, il se dit qu’Hollywood se l’arrache déjà et on ne pourra jamais vraiment la rencontrer en chair et en os, car Tilly est entièrement générée par intelligence artificielle, il s’agit d’une pure création venue d’un studio néerlandais.
La productrice a fièrement déclaré qu’elle souhaitait qu’elle devienne la prochaine Natalie Portman ou Scarlett Johansson, ce dernier nom n’a pas été choisi au hasard, depuis son rôle en 2013 dans le film Her dans lequel elle interprétait, avant l’heure et avec sa voix, un programme d’intelligence artificielle. Tout le monde essaie de reproduire dans la vraie vie ce qui a été magnifiquement mis en image en fiction il y a plus de dix ans.
Lorsqu’on observe l’image de Tilly Norwood, une jeune et jolie femme brune, nous avons déjà l’impression de la connaître, de l’avoir déjà vue dans la rue ou dans notre imaginaire. C’est la force probabiliste des grands modèles d’images qui, en fonction d’un large corpus, parviennent à produire une apparence moyenne, normative, mais avec assez de charme pour qu’elle sorte du lot sans en faire trop. Il y a sûrement une jeune femme dans le monde qui lui ressemble ou inversement.
Pour parvenir à ce résultat, la machine a dû voler, absorber quantité de visages de comédiennes pour générer ce portrait robot. Dans notre monde connecté, il est si simple d’avoir une vie en ligne que Tilly dispose d’une page Facebook, d’un compte Instagram et fait vivre de ce qu’on appelle une back story, une vie en ligne qui témoigne de son histoire et de ses pseudos émotions. "Je suis peut-être générée par IA, mais je ressens de vraies émotions", a-t-elle déclaré dans un jeu de dupe, mais après tout, il s’agit de cinéma.
Pour la promouvoir, sa productrice-créatrice met en avant les arguments commerciaux et joue sur la période d’austérité vécue par l’industrie : "avec Tilly Norwood la créativité n’est pas limité par un budget".
Les comédiens Ralph Ineson, Nicholas Chavez ou encore Melissa Barrera, qui interprétait Carmen dans le film musical éponyme de Benjamin Millepied, ont tous crié au scandale..."
Sources :
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https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/journal-de-18h/le-hamas-expiera-en-enfer-s-il-rejette-le-plan-de-paix-pour-gaza-1937748
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/un-monde-connecte/tilly-norwood-une-actrice-integralement-generee-par-ia-incarnation-de-la-panique-de-la-profession-4033221
https://www.lepoint.fr/culture/ia-qui-est-tilly-norwood-le-nouveau-visage-qui-agite-hollywood-29-09-2025-2599864_3.php