"Six mois après le début de ce qu'elle appelle "une opération militaire spéciale", trouver de nouveaux soldats est pour l'armée russe un défi de taille...
Dans un immense forum militaire, près de Moscou, à côté des chars alignés et des fusils d'assaut, les bureaux de recrutement sont en bonne place...
"Il va falloir que tu passes un examen médical sur ton lieu de résidence..." dit la recruteuse à un jeune homme.
Il n'a que 17 ans mais il veut déjà s'engager...
"Cette opération spéciale, ça ne t'inquiète pas ?" demande une journaliste.
"Non, parce que, pour moi, c'est clair : je veux protéger mon pays natal. Peu importe que ce soit dangereux ou non. Je peux dire que je suis prêt à sacrifier ma vie pour mon pays, pour ma patrie.", répond le jeune garçon.
Mais, pour convaincre ces futures recrues, l'armée russe n'utilise pas que l'argument patriotique... en opération, un soldat peut gagner plus de 3000 euros par mois, quatre fois le salaire moyen !
"Les soldes sont très correctes et ça pour tous les soldats. Il y a aussi beaucoup d'avantages et des primes.", commente une recruteuse.
Si l'armée propose à ses recrues de confortables avantages financiers, si la région de Saint-Pétersbourg promet à chaque nouvel engagé un accès privilégié au parc pour ses enfants, et même un terrain pour faire bâtir sa maison, c'est que Moscou aurait cruellement besoin d'hommes.
Même si la Russie ne communique pas officiellement sur les pertes subies, il lui faut remplacer les nombreux soldats tués, blessés ou faits prisonniers sur le champ de bataille.
Pour l'heure, Vladimir Poutine se refuse à en appeler à une mobilisation générale.
Les jeunes Russes n'y sont pas favorables non plus...
"Je ne vois pas l'intérêt de tout cela, c'est des bêtises, franchement, non merci..." déclare un jeune Russe.
"Pour moi, la mobilisation générale de toute la Russie, cela n'a pas de sens.", affirme un autre.
Pour renforcer les effectifs des troupes pro Moscou, des profils d'un nouveau genre seraient désormais courtisés : des détenus russes.
Il y a quelques jours, la télévision officielle relayait pour la première fois l'histoire d'un prisonnier de droit commun, libéré pour aller combattre en Ukraine et tué peu après son arrivée.
Des journalistes ont pu obtenir ce qui est présenté comme l'enregistrement d'un ex-détenu d'une prison du centre de la Russie.
Il y raconterait son recrutement non pas par l'armée, mais par le groupe de mercenaires Wagner.
"Nous avons signé une demande de grâce en deux exemplaires. J'ai aussi signé un document disant que j'acceptais de participer à l'opération militaire en Ukraine. Il n'y avait rien d'indiqué sur la durée de l'engagement. Au début, la prison a sélectionné 400 personnes et à la fin, 68 ont été retenus."
Ce témoignage qui n'a pas pu être authentifié de manière indépendante a été confié aux journalistes par une responsable d'une ONG de défense des droits des prisonniers.
Selon elle, les détenus engagés ont reçu la promesse d'une libération après 6 mois de combat.
"Pour les prisonniers, le plus important, c'est d'avoir une chance de quitter la prison, parce qu'il n'y a pas de chose plus affreuse, y compris la guerre, que les prisons russes, avec les tortures et les violences. Selon nous, environ 3000 prisonniers ont déjà été recrutés et plus de 1000 ont été envoyés au combat."
Ces chiffres sont ils plausibles ? Les recrutements de prisonniers sont-ils institutionnalisés ?
Contactés les services pénitentiaires russes n'ont pas répondu aux sollicitations des journalistes."
Le Kremlin vient de publier un décret qui prévoit d'augmenter ses effectifs combattants de 10% à compter du 1er janvier 2023. 137.000 soldats sont ainsi attendus pour rallier les rangs de l'armée russe.
C'est certain, malgré l'expression utilisée par le Kremlin : "une opération militaire spéciale", la Russie mène une véritable guerre contre l'Ukraine...
Et la guerre tue, la guerre détruit, elle tue des Ukrainiens, des soldats, mais aussi des civils, hommes, femmes, enfants, elle tue aussi des soldats russes...
L'euphémisme employé par Vladimir Poutine n'empêche pas toutes les horreurs et les abominations de la guerre.
C'est dans les langages totalitaires que l'emploi de l'euphémisme comme contour ou détour de la réalité est le plus perturbant, car il s'agit ici de faire passer l'expression euphémique pour la réalité elle-même,
Il s'agit là d'une forme de novlangue, telle qu'elle a été définie par Georges Orwell dans son célèbre roman 1984.
"L’élu municipal moscovite, Alexeï Gorinov, a ainsi été condamné à sept ans de prison vendredi 8 juillet pour avoir dénoncé l’assaut russe contre l’Ukraine...
Alexeï Gorinov avait, lors d’une session du conseil municipal à la mi-mars, qualifié le conflit en Ukraine de "guerre", et non "d’opération militaire spéciale", comme le veut la terminologie officielle. Demandant à ses collègues une minute de silence, le député avait également évoqué la mort d’enfants en Ukraine, ce qui, selon la juge, ne correspond pas aux informations délivrées par le ministère de la défense russe dans ses points presse quotidiens."
On assiste là à une répression de toutes les oppositions et contestations et à une remise en cause des réalités de la guerre...
Sources :
https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/guerre-en-ukraine-la-russie-en-mal-de-soldats_5324482.html
https://www.latribune.fr/economie/international/guerre-en-ukraine-l-armee-russe-veut-gonfler-de-10-ses-effectifs-928585.html
https://www.lemonde.fr/international/article/2022/07/08/guerre-en-ukraine-alexei-gorinov-elu-municipal-russe-condamne-a-sept-ans-de-prison-pour-avoir-denonce-le-conflit_6134004_3210.html